Accident à Marcoule: le nucléaire tue !

Accident à Marcoule: le nucléaire tue !



Un grave accident a eu lieu le
12 septembre sur le site nucléaire français de
Marcoule, dans le Gard, en bordure du Rhône entre
Montélimar et Avignon.

Le site en question a un lourd passé – en plus de ce
présent mortel – en matière nucléaire.
C’est en 1956 déjà qu’il a été
créé, les premiers réacteurs nucléaires
français à usage militaire y ont été mis en
route et le site a une longue histoire de bricolage atomique…

    On y produit du tritium pour les têtes
nucléaires et thermonucléaires françaises. Le site
a hébergé le prototype de réacteur
surgénérateur à neutrons rapides Phénix,
qui a cessé de fonctionner en 2009 et qui était
l’ancêtre du Superphénix de Creys-Malville,
véritable bombe en puissance dont les antinucléaires ont
obtenu la fermeture définitive, notamment grâce à
une forte mobilisation des Genevois∙e∙s et de leurs autorités au
nom de l’art. 160E de notre constitution.

    Sur le site on trouve aussi l’installation
Melox qui fabrique des assemblages de combustible atomique dit MOX,
à partir d’un mélange d’oxyde d’uranium
et de plutonium, combustible nucléaire ultra-toxique et
problématique pour le pilotage des réacteurs… Sans
parler encore des nombreux « laboratoires »
et ateliers de traitement ou de conditionnement de déchets
qu’on trouve dans les parages.

Un four explose dans une installation insécure

C’est dans cette vraie pétaudière atomique,
comportant de nombreuses installations nucléaires où
l’on stocke de grandes quantités de déchets
radioactifs et manipule du MOX, donc du plutonium, qu’un four a
explosé le 12 septembre à 11 h 45, causant
un mort et quatre blessés dont un très grièvement.

    L’exploitation de cette installation a
été émaillée d’incidents,
l’autorité de sûreté nucléaire
française (ASN) avait une première fois refusé de
délivrer son autorisation d’exploiter initiale, jugeant
les protections du personnel insuffisantes. Le 6 avril 2011 l’ASN
rappelait son « constat de lacunes dans la culture de
sûreté au sein de l’installation »,
lacunes tragiquement confirmées aujourd’hui.

    L’installation a été
épinglée à moultes reprises par l’ASN. Le 25
mai 2011, lors d’un essai visant à tester les
détecteurs d’incendie, un dysfonctionnement a
entraîné la perte de l’alarme d’incendie de
l’unité d’incinération. Le 15 août
2010, une défaillance de l’alimentation électrique
a arrêté le système de contrôle des rejets
gazeux à la cheminée. Le 26 novembre 2008, un audit de
surveillance interne a révélé que les
détecteurs d’incendie n’étaient pas
contrôlés tous les six mois comme ils auraient dû
l’être. Enfin, une inspection du 7 octobre 2005,
consacrée à la question du risque incendie, a
constaté diverses « anomalies » et
« écarts notables » : nombre
insuffisant de dosimètres pour les équipes
d’intervention en cas d’incendie; entreposage de fûts
de plastique dans un local ne disposant pas de détection
automatique d’incendie, présence de liquide inflammable
à côté d’un poste de soudage, etc.

Eric Besson : un vrai faux-cul atomique !

Tous ces incidents et défauts n’ont rien que d’assez
banal bien sûr. Ils sont ce qu’on trouve toujours et
partout dans tous les coins et recoins de l’industrie
nucléaire dès qu’un fait suffisamment grave conduit
à lever la chape de plomb médiatique qui les occulte.

    Comme toujours les premières réactions
officielles sont venues tenter de minimiser l’impact radiologique
possible de l’accident… A 16h00, l’ASN a affirmé
que l’accident était
« terminé » et ne comportait
« pas d’enjeu radiologique ni d’action de
protection des populations ». On peut
l’espérer, mais on n’est pas forcé de les
croire sur parole !

    Les médias ont cependant largement
pointé du doigt le révélateur constitué par
cet accident, et sa gestion sur le plan de l’information des
populations, en déplorant ce qu’il révèle
d’impréparation à la gestion d’un Tchernobyl
ou d’un Fukushima hexagonal.

    Quoi qu’il en soit, la tentative de limitation
des dégâts – médiatiques ! –
s’est poursuivie avec la déclaration du ministre
français de l’énergie Eric Besson :
« C’est un accident industriel et non pas
nucléaire », déclarait-il. Plus faux-cul tu
meurs ! C’est certes un accident industriel, mais
l’industrie en question n’est pas celle de la dentelle…
mais bien du nucléaire ! Enfin, on a fait du chemin
depuis les pubs TV d’EDF d’il y a 20 ans qui
précisaient que tout bricoleur français n’utilisait
pas une vulgaire « perceuse
électrique » mais une perceuse…
nucléaire ! Aujourd’hui, même les fours
à fondre des déchets radioactifs… et partant sans doute
les perceuses, n’ont semble-t-il plus rien à voir avec
ledit nucléaire !

ContrAtom réagit au quart de tour

Quoi qu’il en soit, cet accident a démontré encore
une fois que le nucléaire comporte toujours des processus
industriels non-maîtrisés qui prennent en otage la vie de
populations entières. A Genève et en Suisse romande plus
généralement, cet accident est de nature à nous
motiver encore dans notre opposition à la poursuite de
l’exploitation du site nucléaire du Bugey à 75 km
du bout du lac, ContrAtom appelle d’ailleurs à participer
à un grand rassemblement dans ce sens qui se tiendra au Bugey le
samedi 15 octobre prochain.

    En attendant, ContrAtom a tout de suite réagi
à l’accident en invitant ses ami-e-s à un piquet
vendredi 16 septembre 2011 devant le monument aux morts flanquant le
Consulat de France. Nous y avons dit – comme à
l’époque des mobilisations contre Superphénix
– aux représentant∙e∙s de la France dans nos murs que nous
exigeons qu’ils ferment le Bugey, comme ils ont fermé
Superphénix, et nous avons utilisé ce rendez-vous pour
partager les dernières infos sur ce qui s’est passé
à Marcoule et sur les enseignements à en tirer.

Pierre Vanek