Hongrie: le retour des années 1930 ?

Hongrie: le retour des années 1930 ?



Le gouvernement hongrois de Viktor
Orban a pris, en janvier 2011, la présidence de l’Union
européenne, avec une loi sur la presse très autoritaire
(le Conseil de la presse est monopolisé par le FIDESZ, le parti
de droite au pouvoir). Autre facteur inquiétant:
l’existence du Jobbik, parti d’extrême-droite
anti-sémite et anti-Rom ; ses groupes paramilitaires
terrorisent la population Rom en toute impunité.

Viktor Orban ne s’est pas arrêté en si
« bon » chemin. Le 18 avril 2011, le
Parlement – 262 sièges au FIDESZ et aux
démocrates-chrétiens, 44 au Jobbik, 80 aux
sociaux-démocrates et aux Verts – a approuvé une
nouvelle Constitution. Le Jobbik a voté contre ce texte, la
peine de mort n’y figurant pas (!); les autres partis ont
boycotté le scrutin.

    Se référant aux « valeurs
chrétiennes », cette Constitution renoue de fait
avec la dictature national-conservatrice de l’amiral
Miklós Horthy (1919-1944). En effet, il y est dit que
« l’autodétermination de l’Etat
hongrois a cessé le 19 mars 1944 » (date du
remplacement de Horthy par Ferenc Salazsi, le chef des
Croix-Fléchées nazies) et aurait été
rétablie « le 2 mai 1990 »
(séance inaugurale du premier Parlement
post-« communiste »).

    Voici quelques-unes des clauses de ce texte :

– Le terme « République » – dont
la proclamation (1945) fut contestée par la droite et la
hiérarchie catholique – est remplacé par
« Hongrie » ; la cour suprême
reprend son nom (Curie) d’avant 1918.

– Il y a restriction du droit de vote pour les « personnes
à capacité mentale limitée ».

– L’intangibilité de la vie : « la vie
du fœtus doit être protégée à partir
du moment de sa conception » – ce qui laisse augurer
l’abolition du droit à l’avortement.

– La famille y est définie comme « l’union
d’un homme et d’une femme », sans
référence aux couples non-mariés
(hétéro- ou homosexuels) et aux familles monoparentales.

– L’Etat « s’efforcera d’accorder la
sécurité sociale aux personnes qui développent une
activité utile à la communauté ».

– Un Conseil budgétaire (monopolisé par le FIDESZ) a
droit de veto sur le budget voté par le Parlement. Dans ce cas,
le président de la République – un ami de Viktor
Orban – pourra dissoudre le Parlement.
– Une révision constitutionnelle exige une majorité de 2/3 des parlementaires ;
 
– Les minorités hongroises (Serbie, Slovaquie, Roumanie)
reçoivent la nationalité hongroise. Les tensions avec les
pays voisins sont donc programmées.

    L’opposition pourra-t-elle entraver ce coup de
barre « à droite toute » ? Rien
de moins sûr. En effet, la gauche du gouvernement s’est
discréditée en appliquant des politiques
d’austérité « made in
FMI » – que la droite a dénoncées pour
revenir au pouvoir afin de mieux les appliquer elle-même !

Hans-Peter Renk