Nucléaire: 34 réacteurs avariés, 60 milliards gaspillés… et 2 libéraux genevois factieux

Nucléaire: 34 réacteurs avariés, 60 milliards
gaspillés… et 2 libéraux genevois factieux



Les antinucléaires
français ont sonné l’alarme le mois dernier pour
demander la fermeture préventive de 34 réacteurs
manifestant un inquiétant « défaut de
série ».

L’info était enfouie sur le site de
l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN)
française : EDF venait de
« découvrir » que sur tous ses
réacteurs de 900 MW, en cas de fuite importante du circuit
primaire, le circuit d’injection d’eau de
sécurité risquait d’être incapable
d’empêcher la fusion du cœur.

    L’ASN avertit que : « en
situation accidentelle, pour certaines tailles de brèche du
circuit primaire principal, l’injection de sécurité
à haute pression pourrait ne pas permettre de refroidir
suffisamment le cœur du réacteur. » Le
système d’injection d’eau de sécurité
est le seul dispositif pour retarder une fusion du cœur
nucléaire lors d’une fuite importante d’eau du
circuit primaire. Son rôle: injecter massivement de l’eau
borée dans ce circuit pour étouffer la réaction
nucléaire et refroidir le cœur.

    Mais, alors que le premier réacteur 900 MW
date de 1977, EDF se découvre incapable de mesurer si
l’eau injectée par ce système se répartit
bien dans les boucles du circuit primaire de ces réacteurs.
C’est ce qui « pourrait ne pas permettre de
refroidir suffisamment le cœur du réacteur. »

Le cœur du problème

EDF a donc exploité 34 réacteurs atomiques, dont ceux de
la centrale du Bugey dans l’Ain voisin, pendant un quart de
siècle, sans s’assurer de l’efficacité du
système principal de prévention de fusion du cœur.
Pourquoi cette découverte tardive ? Il est angoissant
qu’un problème aussi grave ait été
ignoré des décennies durant, d’autant que les
risques sont multipliés par le nombre des réacteurs
concernés.

    Un accident lié à ces
« anomalies » aurait des conséquences
catastrophiques. Dans un contexte où les problèmes de
sûreté se multiplient, cette éventualité
devrait absolument être prise en compte. D’autant que 21
des réacteurs concernés tournent au MOX, un combustible
à base de plutonium « recyclé »
particulièrement dangereux.

La découverte de ces défaillances pose de manière
criante la nécessité d’une transition
énergétique rapide, pour sortir du risque
nucléaire insensé imposé aux
Français·e·s et à leurs voisins depuis des
années. D’autant que les défaillances ne sont pas
exceptionnelles… Pour preuve, la semaine suivant cette alerte,
EDF se voyait obligée de révéler une autre
anomalie sur 19 d’entre les réacteurs déjà
fragilisés par le défaut non résolu sur les
systèmes de refroidissement de secours.

    C’était cette fois une usure
prématurée des « coussinets »
des groupes électrogènes de secours, qui peut
entraîner leur défaillance. Or, ces groupes doivent
prendre le relais en cas de perte d’alimentation
électrique extérieure, pour assurer les
« fonctions vitales » des centrales. La perte
d’alimentation d’un réacteur est un facteur de
risque d’accident nucléaire majeur.

50 ans de subventions abusives

Pendant que se déroulait, dans l’Hexagone, ce feuilleton
de dysfonctionnements nucléaires, c’est des USA
qu’est venu fin février un rapport de la respectée
« Union of Concerned Scientists » (UCS), sur
les aspects économiques du nucléaire. Analysant 50 ans
d’histoire de l’énergie atomique aux USA, le rapport
révèle que toutes les étapes du cycle
nucléaire : des mines d’uranium au stockage des
déchets, plus d’une trentaine, ont
bénéficié de subventions massives et non
remboursables dépassant au total largement la valeur de
l’énergie produite.

    Sans parler du fait que le coût de cette
technologie grimpe toujours, malgré ce subventionnement massif,
tant aux centrales existantes que projetées. Les récentes
propositions budgétaires d’Obama fourniraient à
l’industrie atomique de nouvelles garanties
fédérales pour des prêts à hauteur de 36
milliards de dollars pour la construction de nouveaux réacteurs,
conduisant le total de ces prêts, dont le contribuable
répond, en dernière instance, à une soixantaine de
milliards. Bref tous les risques du nucléaire sont pris en
charge par les citoyen·ne·s, une distorsion grotesque de
la prétendue « concurrence » sur le
marché entre l’atome et des technologies alternatives et
renouvelables…

    Pendant ce temps, en Suisse, des
citoyen·ne·s votaient. En effet, dans le demi canton de
Nidwald, la question du stockage de déchets nucléaires
radioactifs au Wellenberg était reposée au peuple pour la
quatrième fois! A trois contre un, il livrait un NON sonnant
à une proposition déjà refusée lors des
scrutins antérieurs.

Mais que faisait donc David Hiler ?

Moins glorieux est le vote de Berne, ce même 13
février… En effet, le scrutin consultatif sur la
construction d’une nouvelle centrale à Mühleberg a vu
le OUI passer la rampe, de justesse, à  51,2 %. Loin
du « signal fort » en faveur de l’atome
dont se félicitent les FMB, ce résultat, sur le fil, peut
même être interprété comme « en
progrès », puisqu’en 2003 le canton de Berne,
fort « arrosé » par l’argent du
nucléaire, votait à 32 % seulement pour en
sortir…

    Quoi qu’il en soit, ce résultat indique
l’effort à faire pour gagner le scrutin national
décisif en 2013. Un NON bernois aurait été
bienvenu dans ce sens. Pour l’obtenir, il aurait fallu que 0,6 %
des votant·e·s penchent de l’autre
côté… De ce point de vue, le mutisme – avant
le vote bernois – d’un Canton de Genève, pourtant
consulté lui-même et tenu constitutionnellement par
l’art. 160E d’employer « tous les moyens
juridiques et politiques » pour contrer le
nucléaire est une forfaiture.

    Une forfaiture attribuable au penchant
pronucléaire du libéral Mark Muller qui préside le
gouvernement genevois et à l’inaction volontaire de sa
coreligionnaire Isabel Rochat, en charge des questions
énergétiques. Ils auraient dû – avec les moyens de
l’Etat de GE – construire et adresser à nos
combourgeois bernois un message présentant toutes les raisons de
refuser Mühleberg II, comme le fait Genève. C’est
bien le diable s’ils n’auraient pas réussi à
déplacer un gros demi-point de l’opinion bernoise !
Et, pendant ce temps, les deux Verts au Conseil d’Etat
s’occupaient d’autre chose. Déplorable !

Pierre Vanek