Salaire minimum: enfin la sortie de la salle d’attente ?
Salaire minimum: enfin la sortie de la salle dattente ?
Fin octobre 2010, la commission
législative du Grand Conseil reprendra enfin le dossier
« salaire minimum » quelle na,
jusquà présent, cessé de mettre en
veilleuse, après avoir pourtant voté
lentrée en matière en novembre 2008 par 12 voix
contre 2.
Pour ne pas avoir à traiter sur le fond le projet de
décret déposé par solidaritéS en
février 2008 et demandant linscription dans la
Constitution neuchâteloise du droit à un salaire minimum,
la majorité de la commission sest, dans un premier temps,
réfugiée derrière largument quil
fallait attendre lavis de droit sur la validité formelle
de cette proposition, que le prof. Pascal Mahon préparait alors
à la demande du canton de Vaud, confronté à une
même initiative constitutionnelle, déposée
là aussi par solidaritéS.
Prétextant un recours pendant au Tribunal
fédéral, à la suite de la décision
négative du Grand Conseil genevois contestée par les
initiants, la majorité de la commission législative du
Grand Conseil neuchâtelois décidait une année plus
tard, en octobre 2009, de repousser une fois encore le traitement
politique de cette proposition.
Aujourdhui, la question de la validité
formelle de ces initiatives constitutionnelles cantonales est
doublement clarifiée :
1. Par un arrêt du Tribunal fédéral daté du
8 avril 2010 qui donne raison aux initiants qui ont recouru contre la
décision de leurs autorités politique.
2. Par un arrêt de la Cour constitutionnelle du 19 mai 2010 qui a
également conclu à la validité de
linitiative vaudoise et au fait quelle devra donc
être soumise au peuple.
Selon le Tribunal fédéral,
Linitiative poursuit un but dintérêt
public « garant de conditions de vie
décentes », compatible avec le droit
fédéral dans la mesure où sa finalité
nest pas dintervenir dans les rapports entre employeurs
et travailleurs, mais datteindre un objectif de politique
sociale de compétence cantonale.
« […] elle devrait
être admise comme une participation à la lutte contre la
pauvreté et tendrait à la protection du public dans son
ensemble ».
« […] elle est
proportionnée, dans la mesure où elle ne fixe pas
elle-même le montant du salaire minimum, mais impose à
lEtat de le fixer de manière différenciée
« en tenant compte des secteurs économiques ainsi
que des salaires fixés dans les conventions collectives. »
La Haute Cour relève que cette loi ne sera pas facile à
mettre en place, mais considère que largument est
insuffisant pour conclure à linvalidité de
linitiative.
Notre but, à Neuchâtel, étant le
même à savoir contribuer à lutter contre le
phénomène des « workings poor »
par lintroduction dans la Constitution neuchâteloise
dun droit à un salaire minimum aidant à enrayer la
pauvreté, la commission naura cette fois plus aucun
argument juridique pour différer sa prise de position. Place,
enfin, à la politique ! Les débats juridiques,
certes, ont leur importance, mais trop souvent ils sont
convoqués en lieu et place du débat politique par ceux
qui trouvent là un prétexte confortable pour ne pas se
prononcer sur une question qui les dérange. Combien de temps se
passera-t-il encore avant que la population neuchâteloise puisse
se prononcer sur le fond ? Lavenir le dira, mais une
chose est sûre, linstauration dun salaire minimum
dans le canton de Neuchâtel aiderait plus dune personne
à sortir de laide sociale. Qui a intérêt
à faire traîner ce dossier ? Poser la question,
cest (presque) y répondre…
Marianne Ebel