Uni d’été d’Attac-Suisse: crise écologique et réponses altermondialistes

Uni d’été d’Attac-Suisse: crise écologique et réponses altermondialistes



Tous les ans, Attac organise une Uni
d’été. Un vrai ressourcement. Cette année,
moins d’un an après Copenhague, le thème en
était « La Crise écologique – quelles
réponses altermondialistes ? » Gérard
Schelller, membre du comité d’Attac-Genève y
était, à Délémont du 3 au 5 septembre,
et nous livre son compte-rendu.

Vendredi après le film de Coline Serreau Solutions locales pour
un désordre global, nous avons profité d’une
conférence de Romain Felli (doctorant à l’Uni de
Lausanne) et Geneviève Azam (membre du conseil scientifique
d’Attac-France).

    Romain Felli rappelle qu’une solution pour
sortir de « la crise » suppose une relance de
la croissance, génératrice d’emplois,
problématique alors que pour la planète il faut
décroître. Il n’y a pas de vrai débat sur la
nature de cette croissance dans la Confédération
Européenne des Syndicats qui appelle à une mobilisation
générale fin septembre sur le thème :
« contre l’Europe de
l’austérité ». […]

    Dans son introduction, Geneviève Azam
rappelle que sans intervention, l’augmentation de la consommation
d’énergie mondiale sera de 48 % de 2006 et 2030
causant une hausse des températures de 5 à 6
degrés, induisant des modifications climatiques majeures.
L’intervention humaine suppose d’abord une modification du
marché de l’emploi en direction d’emplois verts. Il
faut préparer une société de transition et
remettre en cause les modèles de production et de consommation.
En comptant l’énergie annuelle en équivalent
pétrole par habitant, les pays industrialisés consomment
5,5 tonnes (et parmi eux les USA 7,9 tonnes), l’Afrique 1,3
tonnes, l’Inde 1,6 tonnes. Un alignement des consommations sur
les pays industrialisés supposerait une dépense passant
de 12 milliards de tonnes à 46 milliards par an ! Le
modèle de transition doit donc privilégier la
qualité de la production. Il y a un vrai problème quand
les travailleurs·euse·s, pour assurer un emploi, sont
amenés à fabriquer des produits finissant le plus souvent
en déchets.

Un vrai commerce équitable ?

Le lendemain, Geneviève Azam poursuit en avançant comme
alternative un vrai commerce équitable : un
échange non-marchand, non-monétaire et réciproque.
Elle rappelle que le troc ou le don laissent un rapport temporel entre
humains, alors que lors d’échanges contre monnaie, le
rapport humain finit avec le paiement. Un don ou un cadeau instaure une
dette morale, avec un lien, des valeurs, un devoir réciproque.
Elle insiste en disant qu’équitable est une valeur morale
comprenant la notion de «meilleur» et n’implique pas
l’égalité parfaite ou l’uniformité. Il
s’agit d’une égalité de droit. La nature des
produits échangés est fondamentale dans
l’échange.

    Dans ce nouveau modèle, il faut
considérer les conditions de production et des emplois, la
politique de consommation et surtout la circulation des marchandises.
Le problème des transports est souvent oublié des
modèles de commerce équitable. Pourtant un pot de yaourt
fait souvent 5000 km pour arriver chez le consommateur !

    Actuellement, la baisse des prix n’est plus la
revendication sociale principale, mais, pour différentes
raisons, les prix vont augmenter. Les inégalités sociales
sont nécessaires au fonctionnement du système avec comme
caractéristiques : la délocalisation de la main
d’œuvre et des matières premières et sa
généralisation à la planète entière.
Geneviève Azam propose une relocalisation de la production, en
contradiction avec les accords de l’OMC. La bonne nouvelle
c’est que le système est fragile et ne survivra pas
à long terme !

Que produire et comment ?

Claude Quémar (CADTM-France) de son côté rappelle
que le « commerce équitable » a
été intégré pour devenir un argument
marketing. Les questions principales sont « que
produire » et « comment
produire ». La participation des
travailleurs·euse·s permettrait d’améliorer
les choix concernant cette production. L’impression
générale, c’est que ce système capitaliste
s’écroule. Des pays du Sud proposent des
solutions : l’Equateur ne veut plus exploiter son
pétrole et propose de le laisser sous terre !
L’Afrique du Sud veut fermer des mines de charbon. C’est le
cas aussi au Niger en ce qui concerne l’uranium et le
pétrole. Une expérience de société sans
pétrole est tentée à Cuba. Les mouvements sociaux
en Inde luttent contre l’arrivée de Walmart et Carrefour.

    Il reste des questions ouvertes comme celle du
financement du social et de la santé par le pétrole au
Venezuela, à long terme problématique. En Algérie,
l’exploitation du pétrole va de pair avec des
déséquilibres sociaux extrêmes. Il est insoutenable
de continuer à faire profiter à 20 % des
habitant-e-s de la planète de 80 % de
l’énergie fossile. Le changement doit être radical
et rapide.

    Les agriculteurs s’organisent pour des ventes
directes. En France, des expériences sont menées dans des
quartiers populaires avec des prix inférieurs à ceux des
grands distributeurs. Deux-cent cinquante villes européennes se
déclarent « villes en transition » et
s’organisent en un « mouvement de
Transition ». Un « autre monde »
est en marche […]

    Pour Avid Harie (Université de Leicester et
membre de The Free Association) les militant·e·s sont
devant de vrais problèmes de motivation. Les questions
environnementales ont comme solutions simples l’appauvrissement
pour économiser les ressources. Les plus pauvres sont les
premiers touchés. Un nouveau discours serait d’affirmer
que nous serons plus riches et en meilleure santé si l’on
a moins de biens matériels. Mais il ne résonne
évidemment pas de la même façon selon le niveau
social. […]

    La journée s’est terminée par un
descriptif de la situation en Afrique par Claude Quémar, de la
situation en Pologne par Kamil Majchrzak (revue Telegraph) et de celle
en Russie par Denis Paillard (Paris)… Le tout
agrémenté par la présence, désormais
traditionnelle, d’une équipe valaisanne de producteurs bio
qui nous ont servi les repas. Moment magique à ne pas manquer
l’an prochain !


Gérard Scheller