Honduras chronique du « Porfiriato »*

Honduras chronique du « Porfiriato »*

Triste record ! deux mois après son investiture, le
gouvernement de Porfirio Lobo fait déjà l’objet
d’un rapport du Haut-commissariat de l’ONU aux droits
humains. Et le Comité hondurien des familles de disparus
(COFADEH) d’inventorier les cas de répression contre des
membres des organisations populaires ou leurs proches.

Le 24 février, Claudia Brizuela (fille d’un dirigeant du
Front national de résistance populaire, FNRP) est
assassinée à San Pedro Sula. Depuis décembre 2009,
des militantes du Collectif féministe des femmes universitaires
(COFEMUN), Blanca Dole, Celeste Mejía et Gabriela Flores,
dénonçaient les filatures et le harcèlement
téléphonique, dont elles étaient victimes.

Dans l’Aguan (zone de conflit entre propriétaires fonciers
et paysan·nes sans terre), deux ouvriers agricoles (Ramon Ulises
Castellanos et Miguel Sauceda) sont tués le 12 mars. A la
même date, soit 10 jours après la mort de Joseph Ochoa
(journaliste à la TV Canal 51), le reporter David Meza
Montesinos subit le même sort. Le 15 mars, un commando mitraille
la voiture de Nahum Palacios (lui aussi journaliste, objet de
nombreuses menaces et mesures répressives depuis le coup
d’Etat du 28 juin 2009).

Pourtant le régime sort de son isolement diplomatique :
les USA, la Banque mondiale et le Fonds monétaire international
ont repris leur aide au Honduras. L’Union européenne,
quant à elle, annonce le retours de négociations
commerciales avec ce pays. Conforté, Porfirio Lobo a
lancé un mandat d’arrêt international contre Manuel
Zelaya et 5 membres de son gouvernement pour de supposés actes
de corruption.

Mais la résistance au post-putschisme continue. En
témoigne la 2e « Rencontre nationale pour la
refondation du Honduras », préparée par le
FNRP, qui s’est tenue les 12-14 mars à La Esperanza. Parmi
les décisions prises figure l’organisation d’une
consultation populaire sur l’Assemblée constituante (qui
aurait dû se tenir le jour du coup d’Etat) prévue
pour le 28 juin 2010. La résolution finale appelle
« à continuer la résistance contre les
putschistes et à ne pas reconnaître le gouvernement
frauduleux de Porfirio Lobo ».


* Porfiriato: désignant la dictature de Porfirio Diaz, au
Mexique (1876-1911), le terme est approprié, vu
l’homonymie entre l’actuel président hondurien et
son lointain homologue mexicain.

Un cardinal aux ordres

Le cardinal-archevêque de Tegucigalpa, Oscar Rodríguez
Maradiaga, persiste et signe dans une homélie du 3 mars son
soutien aux putschistes: « Aujourd’hui est un jour
spécial pour rendre grâce à Dieu, par la Vierge
Marie, pour notre Honduras, pour la liberté, la
souveraineté et l’indépendance que Don Roberto
Micheletti a su défendre avec les forces armées et aux
côtés des milliers de Honduriens qui veulent faire partie
des solutions, non des problèmes ». Triste
application de l’axiome : « Errare humanum
est, perseverare diabolicum »…HPR


Chili un tremblement de terre néolibéral

Le 27 février, à 3 h. 30 du matin (heure chilienne), un
tremblement de terre (puissance 8.9) a secoué le Chili de la 5e
à la 9e région (y compris celle de Santiago).

L’épicentre se trouvait dans la ville de
Concepción. En même temps, l’île Juan
Fernández subissait un tsunami et d’autres zones
côtières étaient frappées par
l’irruption de grandes vagues à des centaines de
mètres des côtes. Les médias dominants soulignent
l’aspect « naturel » de ce
séisme et s’appesantissent sur les pillages et autres
actes de délinquance. En Haïti, ils avaient applaudi le
débarquement des marines yankees. Au Chili, l’encore
présidente Michèle Bachelet – oubliant qui furent
les tortionnaires de son père, le général Sergio
Poblete, l’un des rares militaires restés fidèles
au gouvernement de l’Unité populaire en 1973 – a
décrété l’état d’urgence et
déployé l’armée dans les régions
affectées.

Désespoir et répression

Dans une déclaration du 1er mars, le Mouvement des peuples et
des travailleurs (regroupement de la gauche radicale chilienne)
relève : « Vu l’incapacité,
l’absence d’efficacité et la lenteur du gouvernement
pour affronter cette tragédie, les gens les plus touchés
par le séisme ont dû dormir dans les rues, sans
électricité, sans eau potable, sans combustible et sans
denrées de base. Une partie des commerçants ont
profité du désespoir des habitant·e·s pour
augmenter le prix des marchandises. Des centaines de personnes
(travailleur·euses, mères et familles pauvres) ont
dû entrer dans les supermarchés pour
s’approvisionner. La répression policière
s’est déployée rapidement contre la population pour
protéger soigneusement la propriété
privée ». D’autres organisations (Parti
communiste, MIR, Mouvement patriotique Manuel Rodriguez, Gauche
chrétienne) se sont exprimées dans le même sens et
participent aux « comités territoriaux de
reconstruction ».

Elément peu signalé : les constructions des
années 1970 appliquant le code de constructions parasismiques
(promulgué en 1972 par le gouvernement Salvador Allende) ont
mieux résisté que celles effectuées après
1973, période au cours de laquelle l’économie
chilienne a été dérégulée par la
dictature Pinochet et  les « Chicago
Boys » (économistes libéraux). Une
dérégulation acceptée par les gouvernements de la
« Concertation » et que le nouveau
président de droite, Sébastian Piñera (alias le
« Berlusconi chilien »), souhaite
poursuivre…


Hans-Peter Renk