Affichage libre en procès: entre informations citoyennes et commerciales

Affichage libre en procès: entre informations citoyennes et commerciales

En mai 2009, le Service
d’assainissement de la ville de Lausanne avait
déposé une plainte contre un membre de
solidaritéS, Daniel Süri, sous motif que le mouvement avait
apposé des affiches en dehors des emplacements autorisés.

Suite à un recours, la Juge du Tribunal d’arrondissement
de Lausanne a tranché en faveur de notre camarade le 31 mai
dernier. Si ce succès est positif, le fond de la question, soit
les possibilités d’expression des associations à
but non lucratif, apparait loin des préoccupations de la
Municipalité.

    En début 2009, les gouvernements et le
patronat des pays européens comme de la Suisse présentent
leurs plans de relance sensés répondre aux
conséquences de la crise financière. Au vu des attaques
qui se profilent alors contre les acquis sociaux, la
Confédération européenne des syndicats appelle
à des mobilisations. Celles-ci se tiennent entre le 14 et le 16
juin à Berlin, Prague, Bruxelles et Madrid.
A Genève, la manifestation est annoncée pour le
samedi 16 mai.

Informations citoyennes à la population : un problème d’affichage !

Début mai 2009, les militants de solidaritéS Vaud
placardent des affiches dans l’espace public lausannois afin
d’informer la population de cet évènement
politiquement crucial. A ce moment, les 98 panneaux d’affichage
libre de la ville sont, comme à l’ordinaire, largement
squattés par des affiches de spectacle à but lucratif.
Les jeunes membres de solidaritéS, encore ignorants des
règles d’affichage imposées par la Ville,
apposeront, à l’aide de colle de poisson, 18 affiches sur
quelques pylônes, piliers, murs ou armoires électriques
non prévu à cet effet. La réaction du Service
d’assainissement de la Ville est immédiate : une
plainte est déposée contre Daniel Süri,
considéré comme le responsable de solidaritéS
Vaud, pour délit d’« affichage
sauvage ». Par sentence municipale du 9 décembre
2009, il est condamné à une amende de 230 fr. Ayant fait
recours en temps utile, c’est le 31 mai 2010 que le verdict final
de la juge du Tribunal d’arrondissement de Lausanne est
tombé : ni coupable, ni responsable. Cependant
c’est la forme, à savoir le délai de prescription
ainsi que la personne visée (c’est solidaritéS qui
aurait dû faire l’objet de la plainte), plus que le fond
qui a motivé la décision d’annuler cette
condamnation.

La liberté d’expression en question

Jusqu’en 1994, date du « règlement communal
sur les procédés de réclames du 1er juin
1994 » la liberté d’expression par voie
d’affichage libre était niée aux associations et
sociétés à but idéal. Ce déni fut
alors partiellement comblé par la mise à disposition des
98 panneaux d’affichage libre. Cependant les associations et
sociétés à but idéal, non lucratif et
à ressources modestes, tel que solidaritéS, ne jouent pas
sur un pied d’égalité avec les organisations
à but lucratif qui disposent de ressources en personnel plus
importantes. Ainsi, les premières voient fréquemment
leurs affiches arrachées en l’espace d’une heure et
perdent ainsi la possibilité de faire connaître leurs
activités. C’est donc bien le droit à la
liberté d’expression qui est au cœur de cette
affaire. Pour le défendre, et face au
désintérêt marqué de la Municipalité
sur cette question de fond, une motion a été
déposée auprès de celle-ci par Pierre-Yves
Oppikofer, membre d’A Gauche toute ! le 15 juin dernier.
Il demande notamment à ce que le nombre de panneaux
d’affichage libre soit augmenté et que la publicité
commerciale, y compris celle des spectacles à but lucratif, en
soit proscrite.

Isabelle Lucas