Non aux principes de la Banque mondiale: pour un arrêt immédiat de l’accaparement de terres !

Non aux principes de la Banque mondiale: pour un arrêt immédiat de l’accaparement de terres !



Quinze à vingt millions
d’hectares dans les pays en développement ont fait
l’objet, depuis 2006, de transactions ou de négociation
impliquant des investisseurs étrangers. Cette tendance
s’est renforcée depuis la crise alimentaire de 2008. La
Banque Mondiale cherche à rendre « socialement
acceptable » cette mainmise. Via Campesina, avec
d’autres organisations, lance un appel contre cette mise à
l’encan. Nous en publions de larges extraits, avec nos
intertitres.

En réponse à la nouvelle vague d’accaparements de
terres, par laquelle des Etats et des investisseurs privés, de
Citadel Capital à Goldman Sachs, louent ou achètent des
dizaines de millions d’hectares de bonnes terres agricoles en
Asie, Afrique et Amérique Latine pour produire de la nourriture
ou des agrocombustibles, la Banque mondiale (BM) est en train de
promouvoir un ensemble de sept principes afin d’assurer le
succès de ces investissements. […] La BM semble
convaincue que tout flux de capital privé visant à
l’expansion de l’agrobusiness transnational là
où il n’a pas encore pénétré est bon
et doit pouvoir avancer afin que le secteur industriel puisse retirer
plus de richesses du milieu rural. Comme ces investissements sont
liés à une privatisation massive et un transfert de
droits sur la terre, la BM veut mettre en application un certain nombre
de critères afin de réduire les risques
d’explosions sociales :
« respect » des droits des utilisateurs
actuels de la terre, de l’eau et d’autres ressources (en
les indemnisant), protection et amélioration des conditions de
vie au niveau des familles et des communautés (en fournissant
des emplois et des services sociaux), et respect de
l’environnement. Ce sont les idées centrales qui se
cachent derrière les sept principes de la BM pour permettre un
accaparement de terres « socialement
acceptable ».

    Ces principes n’atteindront pas leurs
objectifs annoncés. Ces principes sont plutôt un
écran de fumée pour tenter de légitimer
l’acquisition de terres à grande échelle. […]

A la recherche de dividendes

L’accaparement de terres a commencé à
s’intensifier dans de nombreux pays déjà au cours
des dix ou quinze dernières années, avec l’adoption
de politiques de dérégulation, d’accords
commerciaux et d’investissements, et des réformes de
gouvernance tournées vers le marché. Les récentes
crises alimentaire et financière ont fourni le prétexte
à cette vague d’accaparement de terres par les
gouvernements et les investisseurs financiers pour essayer de garantir
la capacité de production agricole et les futurs stocks
alimentaires, ainsi que des actifs qui, à coup sûr, leur
fourniront de grands dividendes. Les gouvernements riches cherchent
à louer des terres agricoles pour de longues périodes
afin de nourrir leurs populations et leurs industries.
Parallèlement, les firmes sont à la recherche de
concessions de longue durée pour y établir des
plantations où elles produiront des agrocarburants, du
caoutchouc, de l’huile, etc. On observe la même tendance
dans les régions côtières où la terre, les
ressources marines et hydriques sont vendues, louées ou
cédées à des promoteurs de tourisme et aux
élites locales au détriment des pêcheurs artisans
et des communautés locales. D’une manière ou
d’une autre, les terres agricoles et les forêts sont
soustraites au contrôle des petits producteurs – femmes et
hommes –, des pêcheurs et des éleveurs à des
fins commerciales, ce qui conduit à leur déplacement,
à la faim et à la pauvreté.[…]

Priorité à la réforme agraire

L’accaparement de terres à grande échelle –
même quand il n’est pas accompagné
d’expulsions forcées – prive les communautés
locales de terre, détruit des modes de vie, donne moins de place
aux politiques agricoles orientées vers les paysans/paysannes,
et entraîne une distorsion des marchés en favorisant la
concentration toujours plus grande de l’agrobusiness et du
commerce global, plutôt que de promouvoir une agriculture
paysanne durable, tournée vers les marchés locaux et
nationaux et les générations futures. Cela
accélérera aussi la destruction des
écosystèmes et la crise climatique. […]

    L’accaparement de terres à grande
échelle doit cesser immédiatement. Les principes de la BM
essaient de faire croire que les accaparements de terre peuvent ne pas
avoir de conséquences désastreuses. Les organisations
paysannes et des peuples indigènes, les mouvements sociaux et
des groupes de la société civile reconnaissent largement
que ce qu’il faut plutôt, c’est :

1. maintenir la terre entre les mains
des communautés locales et mettre en œuvre une
véritable réforme agraire afin d’assurer un
accès équitable à la terre et aux ressources
naturelles;




2. soutenir fortement
l’agriculture paysanne agroécologique, la pêche et
l’élevage à petite échelle, des programmes
de recherche agronomique participative et des programmes de formation,
afin que les petits producteurs puissent produire en abondance des
aliments, de qualité pour tous et toutes;




3. changer en profondeur les
politiques agricoles et commerciales en vue d’adopter la
souveraineté alimentaire et soutenir les marchés locaux
et régionaux auxquels les gens puissent accéder pour en
tirer profit;




4. promouvoir des systèmes
agricoles et alimentaires basés sur le contrôle par les
communautés de ressources telles que la terre, l’eau et la
biodiversité. Mettre en oeuvre des régulations strictes
et obligatoires qui limitent l’accès des entreprises et
autres acteurs publics et privés aux terres agricoles, aux zones
côtières et humides, aux pâturages et aux
forêts.

Aucun principe au monde ne peut justifier l’accaparement de terres !