Un internationalisme du 21  siècle

Un internationalisme du 21  siècle



Le XVIe congrès mondial de la
Quatrième Internationale s’est tenu fin février en
Belgique. Quelque 200 délégués issus des quatre
continents ont débattu de la situation mondiale, marquée
par la convergence des crises économiques et écologiques,
et des tâches des marxistes révolutionnaires dans ce
contexte inédit.

Issue de l’Opposition de gauche au stalinisme bannie d’URSS
à la fin des années 20, la Quatrième
Internationale, soixante-douze ans après sa création,
garde une forte capacité d’intégrer à son
programme et à sa pratique militante de nouvelles questions
politiques et sociales, dont les luttes féministes ou le combat
LGBTI (Lesbiennes, Gays, Bi, Trans, Intersexe). Le réchauffement
climatique et les dégradations de l’environnement
étaient cette fois au cœur des discussions, qui ont
été suivies par l’adoption d’une
résolution écosocialiste.

Au sud-ouest du nouveau

La crise climatique est considérée comme une aubaine pour
relancer des mobilisations à caractère internationale. En
Amérique latine, la conscience de l’urgence est
particulièrement aiguë. Les
délégué-e-s vénézuéliens,
mexicains ou péruviens ont témoigné de la vigueur
des luttes écosocialistes dans leur pays, notamment parmi les
mouvements indigènes. Majoritairement portés par
des femmes, ces mouvements se battent pour la sauvegarde des
forêts avec lesquels les indigènes vivent en symbiose
– forêts qui sont accessoirement des puits de carbone
indispensables à la régulation du climat. Dans ce
contexte, la participation au « sommet » de
Cochabamba convoqué par le président bolivien
progressiste Evo Morales a été jugée prioritaire.

En Europe, on assiste, semble-t-il, à une renaissance de
l’altermondialisme centré sur les thèmes
climatiques et sur des bases plus radicales (« changer le
système, pas le climat ! »), comme l’a
montré la manifestation massive de Copenhague. Il s’agit
d’œuvrer à la transformation de cette mobilisation
en un mouvement de masse capable de créer des rapports de force
face aux gouvernements.

D’Amérique latine émane aussi la proposition du
président vénézuélien Hugo Chavez de
constituer une Ve Internationale, qui a pour principal avantage,
salué par ailleurs par le Congrès, de pouvoir
débattre dans un cadre plus large. Néanmoins, la
proposition a été jugée avec
circonspection : l’histoire du mouvement communiste a
montré combien il était problématique de
construire une internationale centrée sur les objectifs
politiques et diplomatiques d’un Etat, en particulier d’un
Etat qui, comme le Venezuela, n’a pas rompu avec le
système capitaliste.

La IVe dans le monde

Bien sûr, la Quatrième Internationale n’est pas une
internationale de masse. Elle compte environ 30 000 membres, en
incluant les sections sympathisantes, tel solidaritéS.
Cependant, plusieurs groupes interviennent dans des cadres plus large
et rencontrent du même coup un écho important au sein de
secteurs combatifs du monde du travail : c’est par exemple
le cas des camarades de l’ISL (International Socialist Left) au
sein de Die Linke en Allemagne, des camarades de Marea Socialista
membres du parti de Chavez ou encore des camarades brésiliens
participant à la construction du PSOL (Partido Socialismo e
Libertade) ; tissant des liens étroits avec le mouvement
des paysans sans-terre, le PSOL cherche à prendre la
relève du Parti des travailleurs qui s’est vendu au
social-libéralisme de Lula.

En Afrique, l’Internationale est faible, même si elle peut
compter sur des réseaux militants au Congo, en Afrique du Sud et
surtout dans plusieurs pays du Maghreb. Aux Etats-Unis aussi, sa
présence est peu significative (quelques centaines de
militant·e·s dans trois organisations
différentes). En Amérique latine en revanche, il existe
une dynamique positive et les sections se renforcent.

En Asie, le tableau est contrasté : elle est absente dans
un pays aussi essentiel que l’Inde où les luttes
ouvrières sont souvent dirigées par des groupes de
tradition maoïste ; elle n’est guère
présente en Chine (un petit groupe basé à
Hong-Kong). Cependant, le Pakistan semble offrir des perspectives
encourageantes; en effet, le Parti des travailleurs pakistanais et ses
presque dix mille membres est sur le point d’adhérer
à l’Internationale. En outre aux Philippines, la section
la plus importante de la Quatre mène une lutte sans merci contre
un gouvernement autoritaire, dans des conditions de
semi-clandestinité. Signalons enfin la politique courageuse de
nos camarades sri-lankais, dont l’organisation, à
majorité cinghalaise, s’est opposée en bloc
à la guerre impérialiste contre les
habitant·e·s de l’Eelam tamoul et a apporté
un soutien concret aux victimes civiles.

Un souffle nouveau en Europe ?

En Europe, parmi les processus les plus prometteurs, mentionnons les
camarades portugais engagés dans le Bloc de Gauche, les danois
dans l’Alliance Rouge et Verte, le PPP polonais (Polska Partia
Pracy) chef de file des luttes de mineurs dans ce pays, sans oublier la
petite section qui vient de se créer en Russie sous le nom de
Vperiod, véritable retour au source !

Le processus de construction du NPA, dont quelque 2’000 membres
revendiquent leur filiation à la Quatre, a retenu
l’attention des délégué-es :
malgré ses défauts de jeunesse et les difficultés
objectives, conséquence du reflux des luttes ouvrières
constatées depuis mars dernier, le NPA est
considéré par une majorité des
délégué-es comme un exemple à suivre
d’un point de vue tactique. Pour les années à
venir, la construction de « partis anticapitalistes
larges » sur une base d’indépendance de
classe non négociable, c’est-à-dire avec le refus
de toute participation à des gouvernements
sociaux-libéraux, a en effet été
privilégiée par le congrès.

De nos correspondants au Congrès

La plupart des textes adoptés par le
Congrès sont disponibles sur le site de la revue Inprecor
http://orta.dynalias.org/inprecor/home