Un film de jérôme Host: « Un racisme à peine voilé »

Un film de jérôme Host: « Un racisme à peine voilé »

La défense du droit à porter ou à ne pas porter le
voile ou le foulard, l’interprétation du rôle
d’un Etat laïc (neutre par rapport à toutes les
religions et convictions philosophiques), mais aussi la protection des
droits des femmes sont autant de thèmes qui se mélangent
dans un débat souvent caricatural, où les médias
jouent de plus en plus dans le registre des émotions et du
sensationnel. Il intéresse bien sûr la Suisse, qui vient
d’interdire la construction des minarets et multiplie les projets
de mesures islamophobes.

    En France, de l’interdiction de porter le
voile à l’école en 2004 à la candidature
d’Ilham Moussaïd sur les listes du NPA aux élections
régionales, en passant par le débat sur
« l’identité nationale »,
c’est non seulement un pays entier qui s’interroge, mais
aussi des militant-e-s de gauche, féministes et laïcs, qui
s’opposent, voire se divisent. Les arguments qui fusent se
revendiquent de grands principes : le port du voile serait un
signe de l’oppression des femmes ; mais Ilham
Moussaïd le porte en s’affirmant féministe et
anticapitaliste; en classe, il mettrait en péril la
laïcité; mais son interdiction dans les écoles
exclut des filles issues de l’immigration ou des anciennes
colonies de l’enseignement public…

    La question du voile se retrouve
inévitablement mêlée à une
problématique plus large, à savoir la place de
l’islam en Europe, avec toutes les peurs et les questions que
l’attitude des autorités, de la grande presse et des
milieux dominants suscitent. Dans le débat public, on entend
l’avis de femmes et d’hommes,  dirigeants
européens, enseignants, ainsi que féministes, de divers
horizons… qui sont pour la plupart blancs, chrétiens et
d’origine européenne. Quid de l’avis des femmes
portant le foulard ou le voile ?

    A travers son film Un racisme à peine
voilé, Jérôme Host, qui se définit comme de
gauche, athée et plutôt anticlérical, tente de
s’intéresser aux premières concernées pour
poser le « problème » autrement. Il
livre les témoignages de jeunes femmes portant ou non le
foulard, de professeurs, de sociologues, de militantes
féministes ou encore de membres d’associations de
quartier. Au-delà des grands principes, parfois utilisés
de façon simpliste, les intervenant-e-s nous amènent
à nous poser de nouvelles questions: pour combattre
l’intégrisme religieux, faut-il exclure des jeunes filles
de l’école obligatoire? N’est-il pas dangereux de
privilégier le symbole sur la réalité vécue
par les femmes ? Le féminisme
« anti-voile » n’est-il pas
l’expression d’une capitulation devant la montée du
racisme et de l’islamophobie ? N’exclut-il pas des
femmes plutôt que de les défendre ?

    Loin de vouloir apporter des réponses
définitives à toutes ces interrogations,
Jérôme Host a le mérite d’apporter un regard
perspicace sur ce débat houleux en dé(voilant) plus
d’une fois un racisme inavoué. A regarder sans tarder en
ligne à l’adresse : http://ajcrev.over-blog.com/

Giulia Willig