Des arguments pour inscrire la parité dans la Constitution genevoise

Des arguments pour inscrire la parité dans la Constitution genevoise

Le Collectif « Femmes
pour la parité » avait récolté
250 signatures de femmes et 250 signatures d’hommes pour
proposer à l’Assemblée constituante
d’inscrire le principe de la parité hommes/femmes
dans le projet de Constitution genevoise. Le 13 janvier, une
délégation du collectif a présenté aux
commissions « droits politiques » et
« institutions » réunies
l’argumentaire suivant :

Notre groupe « Femmes pour la parité »
s’est constitué en réaction aux résultats de
l’élection d’octobre 2008 à la Constituante.
14 élues pour 80 sièges, cela signifiait un recul de 35
ans du point de vue de la représentation des femmes à
Genève, et pointait l’inutilité de la patience des
femmes et de leur espoir dans une lente mais sûre avancée.
Dans ce groupe, nous nous sentons les héritières des
suffragettes qui, dans notre pays comme dans le monde entier, se sont
battues pour le suffrage féminin. En Suisse, il a fallu au moins
100 ans de combats pour faire passer cette idée. […]
Depuis, ce droit, qui fâchait tant les Messieurs du début
du vingtième siècle et qui n’était
même pas envisageable auparavant, est devenu une évidence
bien intégrée dans les mentalités. Il n’en
va pas de même pour la notion d’éligibilité
égalitaire. Or, notre objectif est d’aboutir à
l’égalité réelle. En effet, il ne suffit pas
d’avoir un droit pour qu’il soit appliqué. […]

Principes de la parité

  • L’humanité est constituée d’hommes et
    de femmes en proportions quasiment égales (52 % de femmes),
    il apparaît donc évident que leur représentation
    doit être égale dans toutes les instances politiques et
    juridiques élues par le peuple : c’est une question
    de justice.
  • Malgré les avancées qu’on peut constater
    depuis 1960, la progression du nombre de femmes élues
    n’est pas linéaire, mais fluctue selon les conjonctures.
    Il faut donc que le politique s’engage dans des actions
    volontaristes pour assurer une représentation égalitaire
    des deux sexes au sein des instances élues. La démocratie
    est un système perfectible qui permet de rechercher
    l’inclusion et de combattre l’exclusion.
  • La parité n’est pas un
    « avantage » accordé à un
    groupe social donné, car les catégories
    « femmes » et
    « hommes » sont des catégories
    transversales, c’est-à-dire présentes dans
    l’ensemble de la société (religion, ethnie,
    orientation sexuelle, âge, handicap, langue, etc). Ainsi,
    établir la parité ne désavantage aucune autre
    catégorie sociale.
  • L’une des fonctions de la Constitution est de proposer un
    agencement institutionnel qui permette une représentation
    équitable des citoyen·ne·s
    genevois·e·s et ainsi de favoriser la cohésion
    sociale du canton : la parité répond à ce
    but. D’autres formes d’équilibrage du pouvoir sont
    appliquées dans le système suisse (par exemple la
    représentation égalitaire des petits et grands cantons au
    Conseil des Etats).
  • Les femmes et les hommes ont des expériences de vie
    différentes à plusieurs titres; une participation
    égale aux instances politiques permet d’apporter, dans le
    débat, des thématiques politiques plus variées et
    de faire une place plus importante à des questions qui touchent
    particulièrement les femmes.

Mise en œuvre de la parité

Le principe constitutionnel pourrait se résumer ainsi :

«  Toutes les
autorités élues de la République et Canton de
Genève sont constituées pour moitié d’hommes
et de femmes. Lorsque l’autorité est composée
d’un nombre impair de personnes, une différence d’un
est admise. 
»

Ce principe est simple à appliquer lors des élections. La
liberté de vote des électeurs et des électrices
n’est en rien limitée par ce système. Le scrutin
reste « de liste », c’est-à-dire
que le choix idéologique ou personnel prime ; les hommes et les
femmes ont des chances rigoureusement égales d’être
élu·e·s.

Election du Grand Conseil

Pour les élections au Grand Conseil, les partis doivent
présenter soit deux listes contenant chacune le même
nombre de femmes et d’hommes, soit une seule liste alternant
« femme, homme, femme, homme, etc. » en parts
égales. Si les sièges obtenus par un parti forment un
nombre pair, disons 8, on choisit les 4 femmes et les 4 hommes ayant
obtenu le plus de voix. Si le nombre est impair, les partis se
concertent pour qu’à la fin, il y ait 50 femmes et 50
hommes au législatif.

    Concrètement, l’application du principe
constitutionnel signifierait, pour le Grand Conseil, que 50
sièges doivent être occupés par des hommes et 50
sièges par des femmes. Toutes les règles
électorales resteraient les mêmes (à moins
qu’elles ne soient modifiées par l’Assemblée
Constituante) : quorum, représentation proportionnelle,
listes de partis, apparentements, etc. Chaque bulletin indiquerait
clairement : élection de 50 femmes/élection de 50
hommes. Les partis resteraient libres de présenter le nombre
total de candidats et candidates qu’ils souhaitent, mais les
listes devraient comporter le même nombre de femmes et
d’hommes. Pour les partis, il n’y aurait plus de
concurrence entre hommes et femmes, mais uniquement entre hommes et
entre femmes.

Election du Conseil d’Etat

La difficulté essentielle réside dans le fait que les
autorités exécutives sont toujours composées
d’un nombre impair d’élu-e-s. Comment décider
d’une manière juste et démocratique si le ou la 5e,
voire le ou la 7e, doit être un homme ou une femme ? Une
possibilité est de désigner non pas le dernier élu
ou la dernière élue, mais le premier ou la
première élu-e. La personne qui aurait obtenu le maximum
de voix serait ainsi la première, à qui viendrait
s’ajouter un nombre pair d’élu-e-s, composé
pour moitié d’hommes et de femmes, en fonction des
critères usuels de l’élection (proportionnel,
majoritaire, etc.).

Ces principes s’appliquent à toutes les élections.


Travail collectif présenté par Maryelle Budry, Lorena Parini et Huguette Junod