Honduras: « La résistance continue à

Honduras: « La résistance continue à
l’intérieur, mais elle a besoin de soutien
international »

Educatrice populaire,
âgée de 47 ans, Betty Matamoros (secteur international du
Front national de résistance au coup d’Etat, FNRG)
effectue actuellement une tournée d’information en Europe.
En Suisse, elle a participé à des réunions,
notamment à Lausanne, Genève et Berne. Elle s’y est
entretenue avec notre ami Sergio Ferrari.

Quel est l’objectif essentiel de votre visite en Europe ?

Le FNRG est très préoccupé par la pression que
nous impose la répression militaire. Personne ne garantit notre
sécurité, il n’y a pas de Cour suprême ou de
ministère public pour arrêter la répression. Nous
n’avons pas pu jusqu’ici rompre l’encerclement
médiatique, d’où cette tournée
d’information. La résistance continue à
l’intérieur, mais elle a besoin de soutien international.
Sans cet appui, sans yeux ou oreilles hors du Honduras, nous ne
pourrons pas contrecarrer ce putsch si néfaste pour le peuple

Malgré cette résistance tenace, n’êtes-vous pas dans une impasse ?

Le putsch faiblit devant la résistance pacifique. Les
putschistes souhaiteraient des réponses violentes pour ensuite
justifier la leur. Mais ce n’est pas le cas : la
légitimité du gouvernement Micheletti n’est
reconnue par personne. Les forces armées, de leur
côté, ne font plus de déclarations violentes,
contrairement à leur attitude antérieure.
    Les putschistes rêvaient d’un
scénario de « telenova » :
après 15 jours d’opposition, les gens auraient
quitté les rues. Mais le peuple sent que ses droits sont
violés et s’organise. L’article 3 de la Constitution
stipule qu’on ne doit pas obéissance à un
gouvernement ayant usurpé le pouvoir par les armes.

Le retour clandestin du président Manuel Zelaya, le 21
septembre, au Honduras et sa présence à l’ambassade
du Brésil (Tegucigalpa) favorisent-ils ou non la solution du
conflit ?

« Mel » Zelaya avait constaté que le
Honduras n’était plus un thème discuté
internationalement. Même sur la base du plan de San José
[cf. solidaritéS, nº 152, 28.8.] toute perspective de
dialogue et de négociation avait disparu. Le retour du
président est tout à fait cohérent.

L’Organisation des Etats Américains (OEA) propose une
issue basée sur un plan proposé par Oscar Arias
(président du Costa Rica). Est-ce une proposition viable ?

Cela permet de penser que le dialogue est possible. Le FNRG
n’accepte que le premier point de cette proposition : le
rétablissement du président Zelaya et le retour à
l’ordre constitutionnel rompu le 28 juin. Mais nous
n’acceptons pas l’idée de l’amnistie :
le coup d’Etat est un délit et il doit être
sanctionné. D’autre part, ce plan n’inclut pas la
proposition d’une Assemblée constituante,
revendiquée par le peuple, qui favoriserait des changements
à plus long terme.

Le président de facto a convoqué des élections
générales pour le 29 novembre. Peuvent-elles contribuer
à la normalisation ?

Avec la répression actuelle, c’est inimaginable de
participer à un processus électoral illégitime.
Nous ne pouvons pas voter sous la menace des fusils. D’autre
part, nous ne pouvons pas nous fier aux forces armées, garantes
de cette convocation, qui ont violé nos droits. Le peuple a
déjà dit non à ces élections. Nous
n’irons pas voter.

Votre message à la communauté internationale ?

Nous lui demandons la fin des ambigüités par rapport au
putsch. L’Amérique latine a pris des positions claires et
cohérentes, contrairement aux USA et à l’Europe.
Nous demandons donc une aide à la restauration de
l’ordre constitutionnel, le non-financement
d’élections illégales, des sanctions fortes contre
les putschistes.

    Par ailleurs, je voudrais remercier les mouvements
sociaux et la solidarité internationale (européenne,
latino- ou nord-américaine). Sans leur appui, nous aurions
peut-être disparu de la scène internationale, nous
n’aurions pas pu maintenir notre résistance.


Propos recueillis par Sergio Ferrari

Traduction : Hans-Peter Renk

———————–

Bilan de la répression

Erasto Reyes, dirigeant du FNRG de passage en Europe, fait le bilan de la répression :

« La répression
contre les opposants au coup d’Etat a provoqué la mort de
plus de 20 personnes. 500 autres ont été blessées
et 3000 sont détenues. 12 militants syndicaux figurent parmi les
personnes assassinées (…), certains chez eux,
d’autres dans le cadre des mouvements de protestations contre le
coup d’Etat.


    Un
photographe de El Libertador a été enlevé et
torturé. Une enseignante syndicaliste a été
violée par 4 policiers. Augustina Flores López, membre du
Conseil civique des organisations populaires indigènes, a
été durement frappée par la police, y compris en
public, devant des médias »

Source : Service de presse de la Confédération syndicale internationale

————————-

Le FNRG se retire des négociations Zelaya-Micheletti

14 octobre : devant une manifestation de plusieurs milliers de
personnes à Tegucigalpa, Juan Barahona – coordinateur du
FNRG – a annoncé son retrait des négociations en
cours entre les commissions représentant le président
Zelaya et les putschistes :

    « Ce
qui a motivé mon départ, c’est la discussion sur
l’accord de San José, dont le point 3 prévoit la
renonciation à l’Assemblée nationale constituante.
Je me dois à la Résistance, je ne peux donc signer aucun
accord prévoyant la renonciation à ce droit. (…)
Les médias parleront d’une rupture entre le Front et le
président, mais ce n’est pas le cas. Nous luttons avec le
président pour son retour et pour la Constituante ».

Extrait de : www.rebelion.org, section Amérique latine, Honduras