El Salvador: victoire électorale du Front Farabundo Marti pour la libération nationale

El Salvador: victoire électorale du Front Farabundo Marti pour la libération nationale

Le 15 mars 2009, au Salvador, Mauricio Funes 1,
candidat du FMLN a remporté, avec 51,23 % des suffrages,
les élections présidentielles, contre Rodrigo
Ávila, candidat de ARENA (parti de droite au pouvoir depuis
1989) appuyé par les autres partis bourgeois (48,7 % des
suffrages).

Certains sondages accordaient un meilleur score au FMLN. Or, la droite
salvadorienne, experte en fraude électorale, avait
importé des cars d’électeurs-trices fictifs,
ressortissants des pays voisins ne résidant pas au Salvador et
ne pouvant donc pas y voter ! Mais, contrairement aux scrutins
précédents, le crime n’a pas payé…2

    Le bilan de ARENA est éloquemment
catastrophique : « La désastreuse situation sociale
de ce petit pays de 5,7 millions d’habitants a obligé plus
de 2,5 millions d’entre eux à émigrer,
essentiellement aux Etats-Unis; 47,5 % de la population vit
en-dessous du seuil de pauvreté et 19 % dans
l’extrême pauvreté – quand 0,3 %
accaparent 44 % du revenu national. Un chômage massif et
le taux d’homicides le plus élevé du continent
(67,8 pour cent mille habitants) complètent le
tableau » 3

    Conséquence des
« réformes » économiques
libérales : la privatisation des services sociaux, la
destruction d’emplois, notamment dans l’agriculture. La
seule industrie de pointe, ce sont les
« maquiladoras » – usines
exonérées de droits de douane et travaillant pour
l’exportation, avec une main-d’œuvre
sous-payée et privée de droits syndicaux. Durant 20 ans,
les organisations populaires ont dû lutter d’abord contre
la privatisation des besoins humains vitaux tels que la
médecine, l’éducation, l’accès
à l’eau.

    En 2001, le colon (monnaie nationale) a
été remplacé par le dollar, soumettant le Salvador
aux fluctuations de la monnaie US. Or, les transferts de fonds
(« remesas ») des émigré·e·s
représentent une part importante des revenus du pays
(3,8 milliards de dollars en 2008, soit 17 % du produit
intérieur brut). Lors des élections de 2004, le
gouvernement étatsunien n’avait pas hésité
à donner un coup de pouce à ses bons amis de ARENA en
menaçant d’interrompre les « remesas », en cas
de victoire du FMLN !

    La tâche du nouveau gouvernement s’annonce donc difficile.

    Pourra-t-il appliquer son programme, pourtant
modéré selon les observateurs ? « Un plan
économique avec de meilleures opportunités pour
distribuer la richesse et les services au sein de la population, [qui]
insiste sur le combat contre la pauvreté et la garantie de la
sécurité alimentaire pour les secteurs traditionnellement
exclus du processus politiques » (Julia Evelyn Martinez,
économiste à l’Université
d’Amérique centrale).

    En effet, ARENA – resté le plus fort
parti du Parlement et pouvant donc y trouver des alliés –
conserve une capacité de nuisance redoutable. Afin de contrer
cette droite rétrograde et cavernicole, la mobilisation des
secteurs populaires – dont une partie n’a jamais
lâché le FMLN, malgré la répression durant
les années de guerre 4 – sera déterminante pour ouvrir une nouvelle page dans l’histoire du Salvador.

Hans-Peter Renk



1    http://fr.wikipedia.org/wiki/Mauricio_Funes
2    Carmen Elena Villacorta, «15 de marzo, las
verdaderas elecciones del siglo en El Salvador», site: www.rebelion.org
3    Maurice Lemoine, «El Salvador: des guérilleros au pouvoir» (20.3.2009), site www.risal.info/
4    « El Frente est un parti
social-démocrate maintenant, mais un parti qui veut aller vers
une révolution socialiste. Ils font cela pour leur base…
des gens vivant en zones rurales qui ont été combattants
ou des familles d’anciens combattants. Si el Frente venait
à renoncer à son effort de construire une
société socialiste, il perdrait une bonne partie de ce
qu’il considère comme son vote de
solidarité » (Julia Evelyn Martinez).

Le Front Farabundo Marti pour la libération nationale

Fondé en 1980, le FMLN regroupe les quatre organisations de
guérilla existantes et le Parti communiste. Son nom est une
référence à Agustin Farabundo Marti :
combattant au Nicaragua dans les rangs de l’armée de
Sandino (dans les années 1930) contre l’intervention des
USA, puis fondateur du Parti communiste d’El Salvador, Farabundo
Marti fut fusillé après l’écrasement de
l’insurrection populaire de 1932.

    Après les accords de paix (1992), le FMLN est
devenu un parti politique légal, représenté au
Parlement et dans les municipalités : il a toutefois subi
en 1994 et en 2004 des scissions reflétant la
décomposition idéologique et morale de certains de ses
ex-dirigeants (Joaquin Villalobos et Facundo Guardado). 

Site officiel du FMLN : www.fmln.org.sv
La revue du FMLN : http://eltorogoz.net
Site de sympathisants du FMLN : www.simpatizantesfmln.org.

L’Alliance républicaine nationaliste (ARENA)

Fondé en 1978, ARENA est le parti de l’oligarchie
salvadorienne et des « Escadrons de la mort »
(bandes paramilitaires d’extrême-droite) réunis.
Très fortement impliqué dans la répression du
mouvement populaire, le fondateur de ARENA, le major Roberto
D’Aubuisson Arrieta (1944-1992) est considéré comme
le responsable de l’assassinat de Mgr Oscar Arnulfo Romero,
archevêque de San Salvador, le 24 mars 1980. Alors que le droit
canon de la « sainte Eglise catholique, apostolique et
romaine » prévoit expressément que le
meurtrier d’un prêtre est ipso facto excommunié,
R. D’Aubuisson est décédé d’un
cancer de l’œsophage, confit en dévotion et muni de
tous les sacrements de l’Eglise