Assez de cadeaux pour les riches: 2xNON au paquet fiscal

Assez de cadeaux pour les riches: 2xNON au paquet fiscal

Comme on peut le voir sur les murs des
villes et villages du canton, et presque à chaque coin de rue,
Noël serait l’occasion pour le gouvernement de gâter
les familles de la «classe moyenne» par l’octroi
d’un allégement fiscal.

C’est du moins ce que voudrait bien faire croire une
campagne d’affichage massive où de charmants bambins et
leurs heureux parents, crayonnés à la manière
d’un dessin enfantin, fêtent la réception de paquets
cadeaux gracieusement enrubannés. Les représentations
patronales sont décidément enchanteresses!
L’émotion y côtoie toujours la poésie la plus
innocente.

Cadeau empoisonné

Mais sous ce gros ruban rouge tape à l’œil et
alléchant se cache en réalité un cadeau
empoisonné. En effet, les quelques rabais accordés aux
familles ne sont qu’un moyen, certes assez habile, de faire
passer une pilule bien amère, et assez peu en phase avec les
besoins sociaux aggravés par la crise économique
actuelle. D’abord, parce que les affiches patronales cachent
l’essentiel: cette réforme consiste d’une part en un
bouclier fiscal pour les très hauts revenus (dont
l’imposition serait plafonnée à 60% contre 70%
actuellement), et d’autre part en de nouveaux cadeaux pour les
grands actionnaires, ceux qui possèdent au moins 10% d’une
société. La première de ces deux mesures remet
directement en cause le principe – déjà bien mis
à mal! – de la proportionnalité de
l’impôt fondée sur la «capacité
contributive» de chacun-e, principe qui est pourtant une des
conditions élémentaires de la justice fiscale et
d’une imposition qui serve à redistribuer les richesses
d’une façon tant soit peu égalitaire.
Les cadeaux aux grands actionnaires et aux entreprises, quant à
eux, avaient déjà été refusés en
votation populaire par les Vaudois-e-s en février dernier
à plus de 54%, dans le cadre d’une votation
fédérale. Mais quand l’intérêt des
dominants est en jeu, les choix démocratiquement exprimés
passent assez vite au second plan… Malheureusement, le constat
que faisait Lénine dénonçant les illusions de
certain-e-s, il y a près d’un siècle, dans
L’Etat et la Révolution, reste d’une criante
actualité: «Les démocrates petits-bourgeois
partagent eux-mêmes et inculquent au peuple cette idée
fausse que le suffrage universel est capable de traduire
réellement la volonté de la majorité des
travailleurs et d’en assurer l’accomplissement.»

Le canton de Vaud, d’ailleurs, est déjà un eldorado
fiscal pour les entreprises, si l’on en croit en tout cas le site
Internet de promotion économique du canton, qui évoque
des conditions fiscales «exceptionnellement avantageuses»
pour les entreprises qui voudraient s’y installer. Ces rabais
fiscaux ne servent pas d’ailleurs à l’investissement
et à la création d’emploi comme voudraient le faire
croire le patronat et ses laquais du gouvernement, mais à
l’accroissement des profits et de la spéculation à
tout crin. Quand les profits des entreprises augmentent – et
c’est bien à ça que sert ce paquet fiscal
d’inspiration néolibérale – les
investissements créateurs d’emplois, eux, ne suivent pas,
comme le montrent les statistiques disponibles pour les pays
occidentaux depuis 30 ans. Car les profits vont prioritairement dans la
poche des actionnaires. Ce paquet fiscal, c’est du pur
néolibéralisme, et c’est pour le moins anachronique
au moment où une crise économique majeure montre
l’échec total des recettes appliquées
fidèlement ces dernières années par ceux qui nous
dirigent.

Donc, sur les 160 millions de pertes pour l’Etat que
représente ce paquet fiscal, 100 millions iront droit dans la
poche des 800 plus riches individus du canton… Pour Noël,
ce ne sont pas les petits souliers des familles que Petit Papa Broulis
a décidé de remplir, mais les souliers vernis de la haute
bourgeoisie vaudoise…

Familles grugées

Quant au 60 millions restants, ils bénéficieraient aux
familles de la «classe moyen-ne». On mesure
déjà le déséquilibre criant: d’un
côté, 800 ultra-privilégiés à qui on
offre 100 millions, de l’autre 100 000 contribuables qui se
partageraient 60 millions. Et ici, le diable se cache dans les
détails. En réalité, les baisses
d’impôts pour les familles s’effectuent via les
déductions pour frais de garde, déductions
plafonnées à 7000 francs. Or, quand un ménage avec
enfants gagne par exemple 60 000 francs annuels, il est très peu
probable qu’elles soient à même de dépenser
un tel montant pour la garde des enfants. Du coup, c’est avant
tout les familles de la classe moyenne supérieure qui
profiteraient de ces quelques déductions!

Plus généralement, en matière fiscale, il
n’y a pas de miracle. Quand les riches paient 100 millions par an
en moins, c’est à toutes et tous les autres de payer
à leur place : hausse des impôts communaux dus aux reports
de charges, baisse des salaires dans la fonction publique, baisse des
subsides à l’assurance maladie, moins de places dans les
EMS, moins de crèches, moins d’argent pour
l’éducation, les logements sociaux ou le
développement des énergies renouvelables… En
période de crise économique qui va se solder par une
hausse significative du chômage et de la précarité,
c’est avant tout à combler les besoins sociaux que devrait
servir l’argent que le gouvernement veut offrir aujourd’hui
à ceux et celles qui n’en ont pas besoin.

Alors, décidément, le 9 février, c’est
deux fois NON qu’il faudra voter sans hésitation contre ce
paquet fiscal!

Justine Detraz