Des mobilisations syndicales qui portent leurs fruits

Des mobilisations syndicales qui portent leurs fruits

La Ville de Neuchâtel, comme
d’autres collectivités, a des difficultés avec ses
finances. Le Conseil communal (exécutif) a imaginé
réduire son déficit sur le dos du personnel. Il
prévoyait de n’accorder que la moitié du
réajustement des salaires du personnel au coût de la vie
(ponction de 1.5% sur les 2.87% d’inflation).

Ce n’était évidemment pas du goût des
associations du personnel! Emmenées par le SSP Ville de
Neuchâtel, présidé par Hans-Peter Renk de
solidaritéS, elles l’ont fait savoir aux élu-e-s de
la commune, aux partis et aux autorités. Le 1er décembre,
le personnel, réuni devant l’Hôtel-de Ville,
accueillait le Conseil général avec force chansons et
slogans. Le parti socialiste qui, dans un premier temps, semblait
prêt à comprendre les soucis de l’exécutif,
se trouva fort emprunté face à ce personnel bien
mobilisé. A quelques mois des élections cantonales, il
n’avait nulle envie de se mettre à dos les
employé-e-s de la commune. Le groupe du Conseil
général PopVertsSol avait annoncé clairement son
soutien au personnel, c’est donc bien du PS que tout allait
dépendre, et tout le monde le savait. Les élu-e-s du PS
se sont finalement ralliés au refus de PopVertsSol. Le budget
concocté par le Conseil communal et avalisé en commission
financière s’est ainsi vu alourdi de 1.57 millions, au
grand dam du responsable des finances, le libéral Ribaux.

Le lendemain, c’était au tour du Conseil d’Etat de
défendre son budget devant le Grand Conseil, gaillardement
qualifié de «meilleur des budgets depuis 1980». Le
boom économique notamment dans l’horlogerie,
conjugué aux restrictions sur les dépenses sociales des
années précédentes, avaient permis un
rétablissement provisoire des finances cantonales. Mais
là aussi il y avait un os: les communes ont pesé de tout
leur poids pour refuser les charges supplémentaires que le
Conseil d’Etat comptait leur mettre sur le dos. La
polémique sur les reports de charges avait donné lieu
à de violentes diatribes dans la presse, entre de respectueux
socialistes, Jean Studer conseiller d’Etat et Laurent Kurth
conseiller communal à Chaux-de-Fonds, tous deux
défenseurs de l’orthodoxie financière
libérale, mais chacun défendant son pré
carré.

Suite à ces manifestations de mauvaise humeur, la commission
cantonale de gestion des finances a corrigé le budget du Conseil
d’Etat qui, lui, tenait mordicus à sa première
version. A ces corrections se sont ajoutés 1,1 million francs
nécessaires pour honorer la négociation conclue au
printemps 2008 avec les syndicats des enseignant-e-s pour un
début de sortie des mesures d’économies et
unilatéralement dénoncée, cet automne, par le
Conseil d’Etat.

Un budget cantonal amendé sous pression de la rue

Au printemps de cette année, les associations du personnel
avaient négocié avec la cheffe du département, la
libérale Sylvie Perrinjaquet, un ensemble de mesures pour
commencer de corriger quelque peu la dégradation des conditions
d’enseignement depuis plusieurs années: maxima
prévus selon le type de classe au niveau primaire, comme au
secondaire I et II, dédoublement de cours dans des classes trop
nombreuses pour certains enseignements, amélioration de la
situation des maîtres de pratique en enseignement professionnel.
Accord signé en bonne et due forme que le Conseil d’Etat
s’est cru dispensé d’intégrer dans son budget
au prétexte qu’un engagement d’un de ses membres ne
vaut pas l’engagement du gouvernement! N’auraient donc de
valeur que les négociations avec le Conseil d’Etat au
complet? Là également, le branle-bas de combat des
associations du personnel et la montée au Château
d’enseignant-e-s pour demander aux député-e-s
d’amender le budget, sous peine de passer sur la liste noire aux
prochaines élections, ont porté leurs fruits.

Jean Studer, responsable socialiste des finances, eut beau tonner
qu’un budget ne s’écrit pas avec la rue, il fut
réduit à voir son déficit s’alourdir de plus
de 15 millions en tout, le PS se ralliant là aussi, au dernier
moment, à l’opposition clairement affirmée de
PopVertsSol. Malgré tout ce qu’il reste à changer
dans la politique cantonale, solidaritéS a apporté, pour
une fois, sa voix à ce budget amélioré. Ces
plaisants événements nous rappellent que rien n’est
jamais joué d’avance et que tout est question de rapports
de forces. Une leçon dont les syndicats, quels que soient leurs
secteurs d’intervention, feraient bien de se souvenir plus
souvent et avec plus de détermination.

Henri Vuilliomenet