Référendum déposé contre la nouvelle loi avenir de l’UNI: Ouvrons le débat !

Référendum déposé contre la nouvelle loi avenir de l’UNI: Ouvrons le débat !

Alors que le lancement du
référendum contre la nouvelle loi genevoise sur
l’université suscitait quelques inquiétudes quant
à son possible aboutissement, il a pu être
déposé le 4 août dernier, muni de 8902 signatures,
soit avec une marge de près de 2000 paraphes.


Un effort militant considérable
a été fourni par le Syndicat des Servies Publics (SSP)
qui a récolté plus de 3500 signatures; des collectifs
d’étudiant-e-s et la CUAE (Conférence universitaire
des associations d’étudiant-e-s), malgré les
vacances universitaires, ont participé à la
récolte de manière conséquente, des
employé-e-s de l’université, bravant
l’arrogance du rectorat, ont également passé du
temps sur les stands. Parmi les formations politiques, seul
solidaritéS s’est engagé dans la récolte.

Si lors de l’adoption de cette loi par le Grand Conseil, le 13
juin, une quasi unanimité était de mise (une seule
opposition), ce n’est pas ce qu’a exprimé la
population dans la rue en signant facilement le
référendum et en exprimant son accord avec les arguments
du comité référendaire (voir l’argumentaire
référendaire paru dans solidaritéS N° 130).

Les partisan-e-s de la nouvelle loi ont accusé le comité
d’avancer des critiques incorrectes et malhonnêtes. Un
certain nombre de vérités ne semblent pas bonnes à
entendre pour ces personnes, alors la pédagogie par la
répétition s’impose. D’après elles,
les taxes ne vont pas prendre l’ascenseur, le personnel ne verra
pas son statut se péjorer, la démocratie interne à
l’Université n’est pas menacée…

Taxes universitaires, augmentations en vue

Avec la loi actuellement en vigueur (art.63, al.1), le montant est
proposé par le rectorat et fixé par le Département
de l’Instruction publique, le montant maximal ne pouvant
dépasser 500 francs par semestre pour tou-te-s les
étudiant-e-s. L’affectation de ces taxes est
également définie, soit 10% pour la bibliothèque
et 90% pour l’encadrement des étudiant-e-s. Avec la
nouvelle loi, le montant des taxes est simplement botté en
touche puisque c’est une loi spéciale qui fixera «le
montant maximum des taxes universitaires en s’assurant
qu’il se situe dans le cadre des montants des taxes des hautes
écoles suisses.» (art.16 al.2) Le site de la
Conférence des Recteurs des Universités Suisses
(www.crus.ch) nous apprend que pour l’année universitaire
2007/2008, les taxes annuelles des hautes écoles suisses ont
varié de 1000 francs pour Genève à 4000 Fr. pour
l’université de Suisse italienne, la moyenne se trouvant
à 1554 Fr. De plus, cinq hautes écoles pratiquent des
prix nettement plus élevés pour les étudiant-e-s
étrangers, dont les parents habitent hors de nos
frontières, de 200 Fr. supplémentaires à Zurich au
double de la taxe pour l’université tessinoise, ce qui
fait que ces étudiant-e-s paient en moyenne 2000 Fr. par an pour
pouvoir étudier en Suisse.

Dans cette loi spéciale qu’en sera-t-il du traitement
financier réservé à ces étudiant-e-s? Quid
de l’affectation de ces ressources? Quel recours possible pour ne
payer qu’une taxe forfaitaire de 65 francs – pratique actuelle –
pour les étudiant-e-s aux ressources les plus modestes? Avec une
moyenne nationale à 1554 Fr., est-ce malhonnête
d’imaginer que les taxes actuelles de 1000 francs vont augmenter?
Certes, il s’agira d’une loi, donc toujours contestable par
référendum, il paraît que c’est cet aspect
démocratique réconfortant qui a poussé le PS
à accepter. Quand on connaît sa capacité à
récolter des signatures, on ne peut que craindre le pire.

Et même si cette fameuse loi spéciale était
refusée par la population, il serait toujours possible de
démanteler l’Université en instituts universitaires
qui ne sont, aujourd’hui déjà, pas tenus de
respecter le montant maximal. Par exemple, le tout nouvel Institut des
Hautes Etudes Internationales a des taxes fixées à 1565
Fr. par semestre pour les étudiant-e-s avec autorisation de
séjour en Suisse et de 2565 Fr. pour les autres
étudiant-e-s, 65 Fr. étant reversés à la
maison mère universitaire. Pour finir de nous rassurer,
«les étudiantes et étudiants suivant une formation
avancée à caractère professionnalisant peuvent
être appelés à participer au coût de
celle-ci» (art.16, al.4). Comment cette participation sera-t-elle
calculée? Sera-t-elle en sus des taxes?

Le personnel? Tout va bien, Monsieur le Recteur

L’autonomisation de l’Université, voulue par cette
nouvelle loi, a pour conséquence que l’Université
est l’employeur de tout son personnel (art.13, al.1). Ainsi, le
personnel enseignant stabilisé ou payé sur des fonds du
DIP ne dépend plus du statut du personnel de l’Etat. Par
le biais d’un règlement sur le personnel, les
compétences qui appartiennent actuellement au Conseil
d’Etat sont déléguées aux organes de
l’Université, avec toutes les prérogatives qui
s’y rattachent, comme la nomination, l’affectation,
l’engagement, les sanctions, le non-renouvellement et la
résiliation des rapports de service.

Dans ce règlement qui reste à écrire,
l’université pourra, en accord avec le conseil
d’Etat, dépasser la rémunération maximale
pour s’adjoindre les services d’un-e professeur-e
particulièrement méritoire. De plus, la
précarité risque d’être de mise pour les
personnes engagées à titre temporaire, car elles le
seront selon le droit privé, si leurs activités
dépendent de fonds extérieurs à
l’Université. En résumé, ceux-celles qui
n’ont pas besoin de rémunérations
supplémentaires les toucheront et celles-ceux qui peinent
déjà à terminer le mois auront encore plus de
difficultés.

Le rectorat décide, les autres subissent

Dans cette loi, il n’y a plus de contre-pouvoir au rectorat: en
effet, ce dernier voit ses prérogatives s’élargir,
alors que l’Assemblée de l’université voit
ses compétence s’amoindrir. De plus, la composition de
cette Assemblée n’est absolument pas paritaire entre les
quatre corps (professoral, enseignement et recherche, estudiantin,
administratif et technique). Alors que le corps professoral ne
représente que 15% du personnel de l’Université, il
dispose de 20 sièges sur 45 dans cette Assemblée.

Maintenant que le référendum est déposé, le
débat doit avoir lieu avec la population et au sein des partis,
notamment ceux de «gauche». La loi actuelle est imparfaite,
mais celle sur laquelle nous voterons est trop dangereuse pour la
démocratisation des études, la liberté
académique et la santé du personnel.

Marie-Eve Tejedor