Allocations familiales à l’heure des lois cantonales

Allocations familiales à l’heure des lois cantonales

Le 26 novembre 2006, les
électeurs-trices suisses avaient largement accepté une
loi fédérale sur les allocations familiales (68% de OUI
au niveau national, 75% dans le canton de Neuchâtel) qui avait
été combattue en référendum par les
associations patronales, l’UDC et les radicaux-libéraux.
Cette loi était un compromis minimaliste adopté au
parlement, prévoyant une allocation mensuelle de 200 francs par
enfant jusqu’à 16 ans et une allocation de formation
professionnelle de 250 francs par enfant en formation
jusqu’à 25 ans.

Selon le système fédéraliste suisse, chaque canton
doit maintenant introduire une loi cantonale dont le contenu
dépendra du rapport de forces social, des traditions (dans les
cantons catholiques pro-familles, les allocations sont plus
élevées) et de la volonté politique qui
s’exprime. La loi fédérale s’était
négociée après que l’organisation syndicale
Travail Suisse (anciennement syndicats chrétiens) ait fait
aboutir une initiative fédérale demandant une allocation
minimum de 450 francs par enfant. L’initiative, conçue
comme initiative pression, fut retirée au profit du
contre-projet laborieusement négocié et qui est bien loin
des demandes syndicales.

UDC xénophobe… comme toujours

Ce compromis fut en particulier violemment contesté par
l’UDC qui dénonçait un transfert social vers
l’étranger, les salarié-e-s touchant des
allocations indépendamment du lieu de résidence des
enfants. Tout un chapitre complexe règle dorénavant les
conditions à remplir pour toucher des allocations pour des
enfants habitant un autre pays, allocations dont le montant sera
établi en fonction du pouvoir d’achat du pays de
résidence. Ces allocations ne s’appliquent pas pour les
pays de l’Union Européenne qui relèvent de
l’accord sur la libre circulation des personnes.

Les changements réels, qu’apportera cette nouvelle loi,
dépendront donc des améliorations apportées par
les lois cantonales et il est difficile de les estimer, car un certain
nombre de conventions collectives offrent déjà des
prestations identiques ou plus élevées que les minima
fédéraux, mais ce sera un bon argument pour les
améliorer.

Les allocations familiales sont financées par des cotisations de
l’employeur variant entre 1 et 3% de la masse salariale, suivant
le montant et le nombre des prestations. La nouvelle loi prévoit
que les personnes sans revenus toucheront aussi une allocation
financée par le canton. Cela concerne surtout des
étudiant-e-s, des pré-retraité-e-s, des
chômeurs-euses en fin de droit, des bénéficiaires
de rentes AI. Les personnes relevant de l’aide sociale ont
déjà un mécanisme d’aide lié au
nombre d’enfants.

Une allocation vitale pour les bas et moyens revenus

Une enquête de 1998 de l’OFS indique que 35% des enfants
vivent dans des ménages à bas revenus et 6% dans des
milieux aisés. L’allocation est pour les bas et moyens
revenus une compensation importante car indépendante du revenu
et du taux d’occupation et il est prévu qu’elle sera
adaptée au coût de la vie.

Neuchâtel: propositions minimalistes du gouvernement

Le Conseil d’Etat décline ses propositions en deux variantes:

Première variante
  • Maintien du financement à charge de l’employeur.
  • Allocation de naissance de 1200 francs.
  • Allocations mensuelle de 200 Fr. pour le 1er enfant à 250 Fr. pour le 4ème.   
  • Allocation de formation professionnelle variant de 280 Fr. pour le 1er enfant à 330 Fr. pour le 4ème.

Deuxième variante
  • Participation des salarié-e-s au financement (0.5 % de cotisations sur les salaires).
  • Allocation de naissance de 1400 Fr.
  • Allocations mensuelles variant de 235 Fr. pour le 1er enfant à 265 Fr. pour le 4ème.
  • Allocations de formation professionnelle variant de 325 à 355 francs

Nous contestons la logique d’une augmentation de
l’allocation en fonction du nombre d’enfants, par contre
nous nous prononçons pour une augmentation plus substantielle de
l’allocation qui restera en tout état de cause fort
éloignée des coûts réels d’un enfant.
L’initiative syndicale demandant 450.- d’allocation par
enfant aurait été une solution plus crédible pour
un gouvernement formé par une majorité de
représentant-e-s du PS et des Verts. Les promesses
électorales ne doivent pas seulement servir pour les campagnes
quand on est dans l’opposition, mais doivent servir de
référence quand on gouverne!

Quant au financement, nous nous opposons à une ponction sur les
salaires; au vu des cadeaux fiscaux dont ont
bénéficié les entreprises ces dernières
années, nous ne voyons pas pourquoi elles ne pourraient pas
financer cette augmentation des prestations.

Autre point problématique: les indépendant-e-s se voient
exonérés de cotisations; cela ne nous semble pas une
bonne chose, car il y a indépendant-e-s et
indépendant-e-s et beaucoup d’entre elles-eux ont
finalement des revenus bas qui justifieraient des allocations pour
enfant et de formation professionnelle.

Enfin, concernant les coûts de l’éducation des
enfants, pourquoi ne pas saisir l’occasion d’un
relèvement des allocations familiales, pour faire des caisses de
compensations aussi un canal de financement des crèches, qui
finalement profitent bien aux employeurs pour leur permettre de trouver
la main d’œuvre dont ils ont besoin? De cela le projet ne
pipe mot.

L’allocation de formation professionnelle s’arrête
dans le projet du Conseil d’Etat, comme dans la loi
fédérale, à 25 ans, alors que beaucoup
d’étudiant-e-s poursuivent leur première formation
bien au-delà de cet âge pour obtenir leurs diplômes.
solidaritéS propose que cette allocation de formation reste
garantie aux jeunes tant qu’ils sont en formation.

Henri Vuilliomenet