Quel projet syndical? Quelles alliances

Quel projet syndical?

Quelles alliances?


Le syndicat interprofessionnel de travailleuses et de travailleurs (SIT), fort de ses 11 000
membres, a tenu son Xe Congrès samedi 17 novembre.


Olivier Salamin


Alors que le mouvement syndical
suisse traverse dans son
ensemble une large crise, le premier
syndicat du canton de
Genève a débattu de son avenir
et de son insertion dans la réorganisation
du paysage syndical.


Le SIT a posé cette problématique
dans son texte préparatoire1
en partant du rappel de
son origine et des principes fondateurs
qui sous-tendent son organisation
et son approche des
luttes syndicales. En réaffirmant
que le/la travailleur/euse doit
être l’acteur/trice du changement, il
privilégie la solidarité, l’implantation
sur les lieux de travail et la démocratie
syndicale. Au delà de ses déclarations
de principes, le SIT, dans sa pratique
quotidienne est confronté, comme
tous les autres acteurs du terrain syndical,
à la grande démobilisation des
salarié-e-s dans la vie de leur organisation.


Démocratie syndicale


La complexité dans laquelle se débat
le monde du travail, tant sur les
plans socio-économique et politique,
que dans le cadre juridique, contribue
à l’appropriation des problématiques
par des spécialistes permanents du
mouvement. Le secrétariat prenant de
plus en plus de place dans l’élaboration
et l’animation des débats.


Le déroulement du Congrès est
d’ailleurs symptomatique de la difficulté
de l’expression de la démocratie
syndicale. Les secrétaires syndicaux,
en vertue d’une règle non écrite, mais
d’une pratique bien rodée, s’abstiennent
de toute prise de parole au profit
des militant-e-s. La clareté et l’enjeu
des débats s’en trouve largement occultée
et ne sont que la mise en scène
d’interventions écrites et préparées.


A quelques rares exceptions le Congrès
ne peut se saisir de problèmes impromptus
ou d’analyses divergentes
de celles débattues dans les préparations
sectorielles.


Ainsi, partant de la réaffirmation
des ses principes fondateurs, le texte
du congrès brosse un tableau qui se
voudrait exhaustif du bilan de l’unité
d’action et des alliances passées. Il en
ressort en fait une liste d’expériences
organisationnelles. Alors que le SIT
est riche, dans sa pratique, de collaborations
à la base, le texte met uniquement
en avant les déconvenues et les
expériences de la reconstruction organisationelle.
Le SIT a été partie prenante
d’expériences capitales dans la
recherche d’un renouvellement syndical.
L’exemple de la CRT (Confédération
romande du travail) en est
un, aucun débat de fond n’a été mené
sur les raisons de ces échecs.


Quel bilan de la construction
syndicale?


Ainsi, lorsque le SIT porte un regard
sur les expériences en cours (CSC,
USS, maison syndicale, Comédia), il
s’agit d’une simple photographie des
opérations en cours. On se trouve
donc lors de ce congrès extrêmement
démuni pour tracer une ligne politique
entre les principes fondateurs du SIT
et les errements des expériences passées
et en cours.


Alors que le Congrès a invité les représentants
du gratin des camarades
(CFDT, CGT, CGAS, etc.) à apporter
les habituels messages de congratulations
réciproques, il aurait pu offrir
une tribune aux courants minoritaires
de la reconstruction syndicale. Les
délégués auraient pu prendre ainsi, la
mesure des critiques de militant-e-s
du Syndicat du livre et du papier
(SLP) face à la naissance
de Comédia, de membres du
Manifeste-SIB face à la direction
de leur syndicat, de syndicalistes
critiques de la politique
et du fonctionnement de
l’USS.


Les participant-e-s au Congrès
n’ont pu que constater,
les difficultés dans la politique
syndicalo-institutionnelle de
leur organisation (absence
d’implantation dans d’autres
cantons pour signer les CCT
nationales, reconnaissance des
partenaires sociaux, procédures de
consultation nationale, etc.).


Vers une alliance
bureaucratique?


Alors qu’une large majorité des secrétaires
syndicaux attendaient du
Congrès un mandat ouvert pour poursuivre,
sans exclusive, le débat avec
les différentes expériences syndicales,
une contribution surprise d’un secteur
professionnel prenait à contrepied la
politique d’attente. Elle demandait
«de donner un signe clair de participation
aux actions syndicales au niveau
national, d’explorer les possibilités
d’un contrat de collaboration avec
l’USS».


La vague d’étonnement passée et
l’absence de contrefeux soutenus de la
part des responsables syndicaux muselés
n’ont pas permis à la majorité
des délégués, qui ont accepté cette résolution,
de prendre toute la mesure
de ce virage. Une aile syndicale réussissant
à stériliser dans l’œuf les germes
d’un débat prometteur. Malgré le
communiqué final, qui reprend la résolution,
la tempère en indiquant vouloir
«renforcer les contacts, les unités
d’actions et les alliances avec d’autres
organisations syndicales», il sera difficile
de débattre notamment avec les
forces critiques, interne à l’USS, en
ayant le mandat de collaborer avec
celle-ci.




1 http://www.sit-syndicat.ch/congres/