LME: nouvelle ordonnance, même pilule!
LME: nouvelle ordonnance, même pilule!
Début octobre, le Conseil fédéral mettait en consultation son projet dordonnance dapplication concernant la loi de libéralisation/privatisation du secteur électrique (LME) dont la date de votation est toujours indéterminée.
Lintroduction du «rapport explicatif» concernant cette ordonnance est intéressant, on y lit dabord qu«Il existe en Europe un large consensus en faveur dune ouverture intégrale des marchés de lélectricité.» Ainsi ce serait un «consensus européen» qui devrait sappliquer chez nous, l«Europe» ayant sans doute le grand avantage aux yeux des néolibéraux du Conseil fédéral de navoir jamais eu à convier ses citoyen-ne-s à se prononcer sur cette question, contrairement à ce qui va se passer en Suisse. Ici en tous cas le «consensus» a été largement brisé en la matière, à tel point que lOffice fédéral de lénergie (OFEN) titrait début septembre son communiqué de riposte à la prise de position anti-LME de lUSS «La critique des milieux syndicaux est inexplicable»,
comme est sans doute «inexplicable» ce qui arrive aux travailleuses/eurs de Swissair ?
Le contrôle public selon Saint-Moritz
ou Davos
Dailleurs, dans ce même texte le département de Moritz Leuenberger se distingue. En défense de cette société de droit privé qui devrait, selon la LME, recevoir le monopole de lensemble du réseau et voir ses profits garantis de par la loi il affirme que: «La Confédération et les cantons ont un représentant chacun au conseil dadministration de la société suisse pour lexploitation du réseau, dont les statuts sont soumis à lapprobation du Conseil fédéral. Ainsi le réseau de transport se trouve-t-il sous contrôle public». Belle conception du contrôle démocratique, indépendamment du «détail» quant aux profits que dégagera cette société pour ses actionnaires
La valse des millions
Dans lintroduction du rapport sur lOrdonnance suit encore un aveu: «En Suisse aussi, la libéralisation du marché en faveur des gros consommateurs est une réalité depuis un certain temps déjà. Par le biais de contrats de fidélisation, ils ont négocié avec de nouveaux fournisseurs des réductions de prix de lordre de 25 à 30 %.» Et, en effet, ce sont «plus de cent millions de francs» par année, comme ladmet pudiquement lOFEN même, que reçoivent chaque année de grosses entreprises, grâce à la pression de la libéralisation électrique annoncée comme une fatalité et
justifiée par son application anticipée et antidémocratique, ainsi que par lactivité spéculative qui laccompagne. Mais cette fatalité nen est quune que pour ceux quelle arrange et dont elle garnit les portefeuilles. A Zurich par exemple nos amis de lAlternative Liste ont initié, avec dautres, un référendum municipal, contre le dynamitage des tarifs publics et les rabais aux gros consommateurs (v. page ci-contre).
Le refus dun choix de dupes
De Zurich aussi est venu un éclairage fort intéressant concernant la votation de juin dernier qui a vu lentreprise électrique cantonale rester en mains publiques plutôt que de tomber dans le giron du trust Axpo. Le Département des travaux publics zurichois avait commandité un sondage à linstitut GfS pour comprendre ce refus «inexplicable» au regard des dogmes néolibéraux. Or parmi dautres facteurs intéressants de motivation des gens qui ont dit NON à la privatisation (lexemple de la Californie, la peur de la constitution dun monopole privé, le refus du bradage dun bien public
) est ressorti le fait «inouï» que 65% des usagers/ères ne voudraient pas avoir a décider individuellement auprès de qui acheter leur courant électrique.
LAMal, LME même combat !
Au contraire de limage dEpinal des avantages pour le consommateurs du choix individuel parmi un foisonnement doffres commerciales, près des deux-tiers des gens voudraient «simplement» un service public de qualité et ne veulent pas alourdir leur quotidien, déjà bien assez pesant, par des choix en continu dont lexemple des assurances maladies leur a donné un échantillon de la complexité et de linefficacité
Et surtout, le Conseil fédéral tente de faire croire que les rabais aux «gros» nattendent que la LME pour être étendus à tout un chacun: «Les petits consommateurs ressentent encore trop peu les effets des conditions préférentielles
» faites aux grandes entreprises, écrit-il la bouche en coeur. Mais qui pourrait encore avaler que les «règles du jeu» social sont les mêmes pour un «acteur économique» qui serait une grande banque
ou un nettoyeur de chez Swissair !
Pas de père Noël pour les gros consommateurs délectricité zurichois ?
Le 2 décembre, en Ville de Zürich les électeurs/trices se prononceront dans le cadre du référendum lancé par nos ami-e-s de l «Alternative Liste», avec les Jeunesses socialistes et le PdT, soutenus par les Verts.
Les référendaires sopposent à lextension des rabais électriques, sous prétexte dadaptation anticipée aux «prix du marché» découlant de la LME, dont bénéficieraient environ 3400 des plus gros consommateurs de lentreprise électrique municipale (EWZ). Celle-ci compte 243000 usagers raccordés à son réseau. LEWZ avait échappé à la privatisation en juin 2000 par un rejet des citoyen-ne-s opposés à la perte de contrôle démocratique sur «leur» entreprise électrique. Or si la décision aujour-dhui contestée des autorités municipales était mise en oeuvre cest le 60% du courant de la Ville de Zürich qui serait vendu à des prix «de marché» fixés de cas en cas.
Les possibilités dintervention des citoyen-ne-s dans les questions tarifaires seraient ainsi confisquées. La privatisation dont il nont pas voulu par la porte de devant se glisserait par la porte de derrière dans le cadre dune tactique du salami et dune politique du fait-accompli antidémocratique, avant même la votation sur la LME. En outre, ce sont 183 000 ménages et 57 000 PME qui risquent bien entendu de payer la facture des rabais consentis aux «gros». Enfin, il nest guère besoin de le souligner, cette politique de rabais aux clients les plus énergivores est évidemment parfaitement antiécologique. (pv)