ItalieDeux chemins distincts à gauche

Italie
Deux chemins distincts à gauche

Après le succès de la
manifestation contre Bush, le 9 juin, qui a rassemblé 100 000
personnes, et la débâcle du rassemblement organisé,
le même jour, par les partis de la gauche gouvernementale, Parti
de la refondation communiste (PRC) en tête, le débat sur
le futur de la gauche italienne est plus ouvert que jamais.

Celui qui attend un bilan critique de la part de ceux qui participent,
depuis un an, à un gouvernement dont la politique est totalement
néolibérale et guerrière, risque
d’être déçu. Après les mauvais scores
enregistrés par tous les partis de l’Union (le PRC perdant
la moitié de ses voix) lors des dernières
élections administratives, fin mai, et surtout, après les
congrès des Démocrates de gauche (DS) et de la Marguerite
(centre) approuvant l’unification de leurs forces dans le Parti
démocratique (PD), la discussion est entièrement
centrée sur la nécessité d’un nouveau parti
unique de la gauche (sans adjectifs) qui devrait réunir le PRC,
le Parti des communistes italiens (PDCI), les Verts et la Gauche
démocrate (membres de DS qui n’ont pas voulu participer au
PD). Ce projet, ouvertement soutenu par le président de
l’Assemblée nationale, Fausto Bertinotti (PRC), est
désormais présenté comme la seule solution pour
sortir la gauche «radicale» de sa crise après une
année de participation au gouvernement.

Le débat politique, centré sur la création de
nouveaux partis de centre gauche, n’aborde pas du tout les
raisons de la crise actuelle et de la perte d’influence parmi les
couches populaires et jeunes. La gauche italienne est
étouffée par des erreurs qui viennent de loin et dont les
actuels groupes dirigeants sont pleinement responsables: compromis avec
les adversaires politiques et de classe, myopie sur la perspective
politique, forte vocation à aider ou amender le capitalisme
national, incompréhension des mouvements sociaux et de leur
nécessaires auto-organisation et indépendance,
eurocentrisme, paternalisme. Cette gauche se pense en fait comme un
acteur capable de gouverner une économie capitaliste
avancée comme celle de l’Italie.

C’est pour toutes ces raisons que nous pensons qu’il est
nécessaire de maintenir une perspective d’une gauche de
classe, d’opposition et d’alternative,
c’est-à-dire anticapitaliste, anti-impérialiste,
féministe et écologiste. En affirmant cela, nous
n’envisageons pas la formation d’un énième
microparti de propagande et d’auto-affirmation, mais nous voulons
construire un acteur politique réel, démocratique,
capable de présenter publiquement une certaine
crédibilité, de s’enraciner socialement et
d’avancer des idées et projets. Un acteur politique
fortement engagé dans les mouvements sociaux, capable de
construire des réseaux, des coordinations, des forums peut
attirer les énergies militantes qui demeurent importantes dans
ce pays, et construire de nouvelles mobilisations. Cela constituait, au
début, l’aspiration du PRC après la rupture, en
1998, avec le premier gouvernement Prodi et son investissement dans le
mouvement altermondialiste depuis la manifestation de Gênes. Cela
demeure la nôtre et c’est pour cela que notre chemin
s’éloigne de celui du PRC. Il ne s’agit pas
d’une scission, mais du refus d’adhérer à une
perspective totalement différente de celle qui prévalait
à la constitution du parti, à une sorte de refondation
sociale-démocrate, qui, d’ailleurs, n’a même
pas été discutée dans un congrès.

Cela n’exclut pas une convergence dans les luttes et les
batailles sociales qui s’annoncent. La séparation des deux
projets politiques, de deux gauches, ne s’est pas produite dans
des discussions internes, mais concrètement, le 9 juin, sous la
forme de deux manifestations concurrentes. Nous sommes engagés
dans la construction de Gauche critique et nous poursuivons ce chemin
avec détermination. Nous préparons un séminaire en
septembre et une première conférence nationale
l’automne prochain.

De Rome, Flavia D’Angeli


Espagne: un jugement digne du franquisme

A la suite de la plainte déposée par la
municipalité «de gauche» de Gijon, dans les
Asturies, deux syndicalistes de combat, Candido Carnero et Juan Morala
ont été condamnés, le 16 juin, à trois ans
de prison et plusieurs milliers d’euros d’amende, cela
grâce aux lois antiterroristes. Ils auraient prétendument
détruit le boîtier de contrôle d’une
caméra de surveillance de la police.

Le procès, truffé d’irrégularités,
intenté aux deux dirigeants du syndicat autonome
«Corriente Syndical de Izquierda» vise clairement à
casser la résistance des travailleurs du chantier naval
«Naval Gijon SA». Ceux-ci, dont la lutte a inspiré
le cinéaste Fernando de Aranoa («Los lunes al sol»),
se battent depuis plusieurs années pour conserver leur emploi et
éviter la fermeture de l’entreprise, dont les terrains
permettraient la construction d’appartements de luxe.

Les protestations internationales ont déjà eu un premier
effet: le 5 juillet, la direction de la prison a demandé et
obtenu leur mise en régime de semi-liberté. Il faut donc
poursuivre et amplifier cette campagne contre la condamnation des deux
syndicalistes. Faites suivre vos messages de protestation et de soutien
à: csi@csi-asturies.org. (ds)