Palestine«Sortez des territoiresoccupés maintenant!»

Palestine
«Sortez des territoiresoccupés maintenant!»

Le 9 juin 2007, à Genève, plusieurs centaines de
manifestant-e-s se sont jointes aux mobilisations se déroulant
dans le monde entier, ce jour-là et la semaine
précédente, pour protester contre les 40 ans
d’occupation israélienne en Palestine. Michèle
Sibony, représentante de l’Union Juive Française
pour la Paix, s’est exprimée lors de cette manifestation.
Nous reproduisons ci-dessous de larges extraits de son intervention.1

«Je représente ici l’Union Juive Française
pour la Paix. L’UJFP est aussi affiliée à la
fédération des Juifs européens pour une paix
juste. Nous sommes des juifs qui refusent d’être pris en
otage pour servir la politique des gouvernements d’Israël.
Nous refusons que les crimes commis dans les Territoires Occupés
Palestiniens (TOP) le soient prétendument en notre nom. Nous
militons pour une paix juste et durable au Moyen-Orient. […]
Après avoir dénoncé les arguments mensongers
évoquant l’autodéfense d’Israël contre
le terrorisme, sa lutte pour la sécurité, son statut de
seule démocratie régionale et la prétendue absence
de partenaire pour la paix, Michèle Sibony poursuit: —
Israël est celui qui veut la paix: Faux et archi faux: depuis Ben
Gourion les choix des gouvernements israéliens ont toujours
été pour toujours plus de terre avec toujours moins de
Palestiniens dessus. Israël a toujours choisi la force dans les
territoires occupés, il a choisi la force au Liban pendant des
années, et à nouveau l’été dernier
l’écrasement de la population civile sous des milliers de
bombes antipersonnelles, et il attend de pouvoir recommencer.
Israël a les yeux tournés vers l’Iran, et menace
même de l’attaquer s’il poursuit un programme
nucléaire civil ou militaire, lui qui est la première
puissance nucléaire militaire de la région, dont les
programmes se sont appelés successivement Masada (faisant
allusion au suicide collectif des Juifs plutôt que de se rendre
aux Romains) et Samson (qui se détruit en même temps que
ses ennemis, en faisant s’écrouler le temple sur
lui-même et les Philistins) et qui refuse de rendre des comptes
à quiconque.

En réalité de mensonge en mensonge, ce qui apparaît
c’est que les seuls buts non illégitimes que le sionisme
pouvait revendiquer devant l’Histoire n’ont pas
été atteints. En ce sens, Abraham Burg le disait
déjà en 2002 alors qu’il était encore un des
leaders du parti travailliste après avoir été
président du Parlement et directeur de l’Agence juive:
«la Révolution sioniste est morte».

Le sionisme voulait faire d’Israël un havre de paix pour les
juifs du monde après la tentative de judéocide nazi. Il
est devenu un lieu de haine, de mort et
d’insécurité pour ses citoyens. Demandez à
Nurit Peled, la fille du Général Peled, qui a perdu sa
fille de 14 ans dans un attentat, et qui a fondé depuis avec
d’autres familles juives et palestiniennes le comité des
familles endeuillées.

Demandez aussi aux habitants de Sderot qui, loin de la bourgeoisie
aisée du centre, rejetés dans la périphérie
pauvre et largement juive orientale du pays, paient tous les jours la
politique du retrait unilatéral de Gaza, et
l’étranglement et les bombardements quotidiens de sa
population depuis. (Puisque l’autre n’existe pas et
n’est pas un partenaire.)

Le sionisme voulait faire d’Israël le lieu d’une
renaissance spirituelle juive: il est devenu le lieu de
dévoiement de toutes les valeurs universelles inscrites dans la
Bible: depuis le Décalogue, jusqu’au principe «tu ne
feras pas à autrui ce que tu ne voudrais pas que l’on te
fasse à toi-même». Voulant faire d’Israël
un refuge contre l’antisémitisme, le sionisme est devenu
une fabrique d’antisémitisme dont il a besoin et
qu’il utilise tous les jours pour justifier son existence et
aussi faire taire toute protestation contre ses actions
guerrières en Europe et dans le monde. Enfermé dans ce
cercle vicieux, il n’a plus d’autre issue que de continuer
à générer de la haine contre les juifs du monde
pour pouvoir continuer à exister par les armes et dans la survie
par les armes.

C’est cette vision du sionisme et d’Israël qui a perdu
et elle doit changer. Bien sûr, cela ne signifie pas la
destruction d’Israël (comme certains ont très envie
de traduire immédiatement) ni le rejet de tous les
Israéliens à la mer, non Israël et les
Israéliens existent et il ne peut s’agir
d’échanger les barbaries. Mais pour échapper
à la barbarie et rejoindre la civilisation humaine, Israël
doit pouvoir devenir l’Etat de tous ses citoyens, qu’ils
soient Juifs ou Palestiniens, il doit pouvoir s’intégrer
par le dialogue et la négociation au Moyen–Orient arabe,
en acceptant les nouvelles et généreuses offres de paix
arabes, dans le cadre du droit et du respect, par la demande aussi du
pardon pour tout le mal causé, et aussi par la réparation.

En conclusion, je voudrais vous lire «une déclaration,
publiée en septembre 1967 dans le quotidien Haaretz, la
première prise de posi tion publique contre l’occupation.
Les douze signa taires peuvent être considérés
comme les pionniers de la lutte contre l’occupation en
Israël.» Je voudrais vous lire cet appel pour que vous
entendiez combien il est juste, et combien nous pouvons en reprendre
ensemble chaque mot aujourd’hui.

«Notre droit de nous défendre contre l’extermination
ne nous donne pas le droit d’opprimer les autres.
L’occupation entraîne une domination
étrangère. Une domination étrangère
entraîne la résistance. La résistance
entraîne la répression. La répression
entraîne le terrorisme et le contre-terrorisme. Les victimes du
terrorisme sont en général des innocents. La mainmise sur
les territoires occupés fera de nous des assassins. Sortons des
territoires occupés maintenant!»


(Shimon Tsabar, Haim Hanegbi,
Rafî Zichroni, David Ehrenfeld, Uri Lifschitz, Arie Bober, Dan
Orner, Moshé Machover, Schneour Sherman, Raif Elias, Elie
Aminov, Yehuda Rozenstrauch)

Nous devons être des millions dans le monde aujourd’hui
à reprendre les mots de cet appel et à conclure avec lui:
«sortez des territoires occupés maintenant!»



1 Le texte complet, ainsi qu’une présentation des
différentes actions menées durant la semaine du 3 au 9
juin, se trouve sur le site www.urgencepalestine.ch