Palestiniens et Juifs d’Israël appellent au soutienà la campagne de boycott, et de sanctions contre Israël

Palestiniens et Juifs d’Israël appellent au soutien
à la campagne de boycott, et de sanctions contre Israël

«Aujourd’hui: nous
savons. Nous savons que toute politique de ségrégation ou
de séparation, bien loin d’encourager une orientation
pacifique, ne fait qu’encourager le racisme et le fanatisme des
deux côtés. […] QUE POUVONS-NOUS FAIRE? Le seul moyen
non-violent qui nous soit offert, ce sont les pressions
extérieures sur Israël. Si les gouvernements ne veulent pas
s’en charger, c’est aux sociétés civiles de
le faire. Le boycott c’est quelque chose que la
société elle-même peut mettre en œuvre».
Ilan Pappe1

Des citoyens israéliens, juifs et palestiniens, sont
choqués par la communauté internationale qui punit les
Palestinien-nes et poursuit les investissements en Israël. Ils
dénoncent ce soutien actif aux violations quotidiennes du droit
international et à la colonisation
accélérée des territoires occupés.
Combattant toutes les formes de racisme et d’oppression, ils
approuvent, comme une forme de résistance non-violente
légitime et nécessaire, les actions de boycott,
désinvestisse- ment et sanctions contre Israël (BDS).2

Tandis que la commissaire aux Droits de l’Homme des Nations
Unies, Louise Arbour, soutient «le débat public» sur
les campagnes, en nombre croissant, d’organisations britanniques
qui les préconisent, Omar Barghouti répond pour
solidaritéSaux objections fréquemment formulées.
Il est l’un des membres fondateurs du PACBI, (Palestinian
Campaign for the Academic and Cultural Boycott of Israel).
Ingénieur de profession, militant des droits de l’homme,
il défend l’égalité comme valeur
universelle. Il s’est résolument engagé en faveur
d’un seul Etat laïc et démocratique pour
résoudre la question palestinienne.

Beaucoup de personnes reprochent au boycott d’encourager
l’antisémitisme et de rappeler la période nazie
où Hitler a commencé son règne en boycottant ce
qu’il appelait l’économie juive. Que
répondez-vous à cela?

Un de mes précédents articles3
développe cette question et je précise ici les points
importants. Le philosophe Etienne Balibar relève
qu’«Israël ne devrait pas être autorisé
à instrumentaliser le génocide des Juifs européens
pour se mettre audessus des lois internationales». Les Etats-Unis
et la plupart des autorités européennes portent sur
l’oppression israélienne un regard qui ne veut pas voir.
En fait, l’Occident a perpétué la misère, la
souffrance et l’injustice qui se sont produites depuis
l’Holocauste.

Quant à l’accusation d’antisémitisme,
évidemment déplacée, elle est clairement
employée comme intimidation intellectuelle. Faut-il encore
répéter que les appels palestiniens au BDS ne visent pas
les Juifs ni même les Juifs israéliens. Ces appels sont
exclusivement dirigés contre Israël en tant que puissance
coloniale qui viole les droits des Palestiniens et le droit
international. L’appui croissant de juifs progressistes
européens et américains à des pressions effectives
contre l’Etat d’Israël constitue un contre-argument
trop peu connu.

Un autre point maintenant que n’abordait pas l’article que
je viens de citer. On ne peut exiger des Palestiniens qu’ils
expient en raison de l’Holocauste, parce que ce génocide
est européen. Nous ne devrions donc pas être
invités à soulager la culpabilité
européenne. En fait, les Européens qui éprouvent
cette culpabilité devraient soutenir le boycott non seulement
pour opposer un principe moral à la politique raciste
d’apartheid d’Israël, mais également pour en
finir avec l’héritage sanglant de l’Holocauste et
des drames qui l’ont suivi.

Une autre objection fréquente contre le boycott est que de
nombreux Palestinien-nes dépendent de leur travail en
Israël, ou d’employeurs israéliens, et que le boycott
pourrait leur nuire. Qu’en pensez-vous?

Je ne m’étendrai pas sur l’attitude paternaliste,
typiquement européenne, que contient cette question. Les
Européens savent-ils mieux que l’immense majorité
de la société civile palestinienne ce qui convient aux
Palestiniens? Cette dernière soutient activement le boycott, le
BDS. Cela va sans dire que les Palestinien-nes peuvent toutefois
souffrir des répercussions économiques, ou autres,
d’un boycott complet imposé à Israël, tel que
ce fut le cas pour l’Afrique du Sud de l’apartheid.

Depuis la Naqba [la catastrophe de l’expulsion massive de 1948],
les Palestiniennes n’ont cessé de souffrir de la campagne
graduelle et persistante de purification ethnique, de la part
d’Israël. Campagne qui s’est
révélée par la confiscation massive de terres, par
l’expulsion – en masse ou fragmentaire – des
indigènes palestiniens; par les massacres aveugles,
particulièrement d’enfants; par le déracinement de
centaines de milliers d’arbres; par la démolition de
milliers de maisons; par la destruction d’établissement
sociaux, culturels et éducatifs; par l’état de
siège et par le déni brutal de la liberté de
circulation des Palestiniens avec la construction illégale du
mur; par les colonies, les routes réservées aux Juifs ou
les centaines de barrages routiers; et par les humiliations et les
viols quotidiens des droits humains élémentaires.

La plupart des Palestinien-nes sont clairement prêts à
supporter des sacrifices supplémentaires pour autant que nous
puissions voir la lumière de la liberté, de
l’égalité et de l’auto-détermination
au bout de ce long tunnel qui dure depuis près d’un
siècle.

Pourquoi jugez-vous le boycott si important?

Moralement et politiquement, le boycott est la forme la plus saine de
résistance civile non-violente. Elle a prouvé son
efficacité en Inde, en Afrique du Sud et dans les luttes pour
les droits civiques aux Etats-Unis. Tout en unissant potentiellement
lesPalestinien-nes dans une lutte à laquelle ils peuvent tous
contribuer, le boycott fait aussi appel à la conscience de tous
ceux et celles qui dans le monde entier ne peuvent plus tolérer
la complicité de leurs gouvernements dans le soutien et la
perpétuation de la politique coloniale et d’apartheid
d’Israël. Et de tous ceux et celles qui veulent
éthiquement contribuer à la fin de cette injustice.

Propos recueillis et traduitsde l’anglais par Aldjia Moulaï, le 15 juin 2007.