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N° 104 (14/03/2007). A la une: L'Amérique latine en résistance
p. 11
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Neuchâtel
Santé: tout va de travers
Les projets de restructurations (lisez projets d’économies) de l’Hôpital Neuchâtelois, qui regroupe l’essentiel des hôpitaux du canton, avaient vu s’élever les régions touchées par les mesures prises. A part Neuchâtel ville, qui voit «son» hôpital se développer, toutes les régions ont fortement réagi (lire nos précédentes éditions).De nouvelles contestations de taille attestent que manifestement, la pilule ne passera pas aussi facilement que voulaient le supposer les responsables de ces diverses mesures. En débat public à La Chaux-de-Fonds, la direction de l’Hôpital Neuchâtelois venue jeudi 8 mars «sinon pour convaincre, du moins pour rassurer» s’est fait fortement chahuter au moment même où était annoncée publiquement la démission des quatre médecins adjoints du service de pédiatrie (postes à 20%) de l’Hôpital de La Chaux-de-Fonds. Tous refusent de travailler avec une maternité sans service de pédiatrie hospitalière annexée et espèrent par leur démission forcer les autorités à prendre plus au sérieux les 15 000 signatures de la population qui n’ont pas suffi à remettre en cause les décisions prises. On le voit, de tous côtés les appels à rediscuter l’avenir des hôpitaux se font pressants. Mais pour l’heure, le Conseiller d’Etat Debély continue à faire la sourde oreille. Il répète inlassablement que les décisions sont prises, qu’elles sont les meilleures possible et qu’on le veuille ou non «la pédiatrie hospitalière sera concentrée à Neuchâtel».
Janvier 2007, c’était aussi l’entrée en vigueur des nouveaux contrats de tout le personnel de la santé du canton. Suite logique de l’autonomisation (le Conseil d’Etat n’aime pas que l’on appelle cela privatisation) des hôpitaux, une convention collective de travail a été signée entre les organisations représentatives du personnel et la direction d’Hôpital Neuchâtelois.
Les mauvaises surprises de la nouvelle grille des salaires
A la suite des mobilisations de l’été 2001, qui exigeaient des augmentations salariales dans le secteur de la santé, une revalorisation partielle des salaires avait été consentie et des promesses de faire mieux encore dans le cadre d’une nouvelle grille salariale à l’étude avaient convaincu le personnel d’attendre patiemment les propositions élaborées par les partenaires sociaux. Les syndicats et associations du personnel se sont assis à la table de négociation en toute confiance: assurance leur avait été donnée que le nouveau système apporterait des améliorations notables pour la majorité du personnel sans prétériter personne.En janvier 2006, une assemblée générale du SSP donnait son aval aux critères retenus pour définir la nouvelle grille salariale. L’outil semblait bon et les garanties données paraissaient suffisantes. Mais une chose est de négocier des grilles salariales abstraites et de les présenter comme positives en assemblée du personnel sans pouvoir chiffrer les salaires individuels, autre chose est de se retrouver avec des fiches de paie où l’on voit pour certaines personnes, des baisses de salaire allant de 5 à 15% sans diminution de la charge de travail ! Ainsi, des cuisiniers ou des jardiniers ont vu leur salaire de janvier diminué de 900 à 1000 francs. On imagine le choc.
Aujourd’hui, c’est dans tous les services de la santé que la révolte gronde. Les baisses de salaires ne sont d’ailleurs pas le seul problème; certaines personnes ont été placées au maximum de leur catégorie, ce qui ne leur donne plus aucune chance de voir leur salaire évoluer. Se trouver bloqué – «à vie» – à moins de 4000 francs par mois, alors qu’on espérait grimper peu à peu dans l’échelle salariale démotive plus d’un-e employé-e. Autre problème: les infirmières de l’hôpital du Locle (pour ne prendre qu’un exemple) ont été colloquées dans une classe inférieure que celles qui travaillent à Pourtalès (Hôpital de Neuchâtel) alors que toutes ont le même diplôme. Fait d’autant plus inacceptable que leur contrat de travail précise qu’elles devront à l’avenir accepter de monter au Locle ou à La Chaux-de-Fonds ou descendre à Neuchâtel selon les besoins du service.
Une bataille de longue haleine
Une assemblée du personnel convoquée par le SSP a décidé d’une marche de protestation le 27 mars devant le Grand Conseil pour appuyer une motion populaire qui demande que le canton «alloue des ressources supplémentaires en faveur du personnel soumis aux conventions collectives de travail santé 21, afin que le salaire brut 2007, indexé à l’évolution du coût de la vie, ne subisse aucune diminution par rapport au salaire brut de 2006».Le programme de législature 2005-2009 du Conseil d’Etat, approuvé par les forces politiques dominantes du canton (PS, Radicaux, Libéraux), annonçait clairement la couleur: 25 millions d’économies dans la santé. On ne peut pas réduire fortement le budget de l’Etat sans que quelqu’un paie. Et qui est ce quelqu’un? Sans surprise, le personnel de la santé et la population en général qui voit se réduire l’offre de prestations hospitalière.
Fin mars ce sera au tour des soins psychiatriques d’entrer dans la tourmente de l’autonomie de gestion: la création du Centre neuchâtelois de psychiatrie, calqué sur le modèle d’Hôpitaux Neuchâtelois, va être présentée au Grand Conseil au cours de la prochaine session. Celle-là même qui verra le personnel de la santé en masse dans la cour du Château. Si le Conseil d’Etat persiste dans sa volonté de passer en force, il faudra autre chose qu’une manifestation devant le siège du gouvernement, car la majorité du Grand Conseil est acquise au principe de réduction des prestations de l’Etat. C’est une bataille de longue haleine qui s’engage, à la fois syndicale et politique, où il faudra du courage et beaucoup de détermination.
Marianne Ebel
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