Allemagne: Où l’on reparle du salaire minimum

Allemagne: Où l’on reparle du salaire minimum

Le programme politique de la «Grande coalition» dirigée par Angela Merkel a visiblement amené la direction de la centrale syndicale allemande DGB à durcir le ton. Lors de son dernier congrès, elle s’est opposée à la politique budgétaire du gouvernement, à la prolongation de l’âge de la retraite à 67 ans, à l’affaiblissement de la protection contre les licenciements comme au développement de secteurs à bas salaires. Des manifestations sont d’ores et déjà planifiées pour l’automne sur ces thèmes. Mais aussi et c’est nouveau, pour revendiquer un salaire minimum de 7,50 euros de l’heure.

Le «tournant» du DGB s’est traduit dans une proposition, adoptée, disant que les syndicalistes réclamaient un changement de politique de la Grande coalition et appelant, dans son dernier paragraphe, les fédérations syndicales à mener des actions publiques autour de trois revendications principales: non à l’âge de la retraite à 67 ans, non à la réforme de la santé et pour un salaire minimum de 7,50 euros. Ce faisant, le DGB répercute un courant d’opinion qui prévaut dans la population. Son attitude initiale, attendre de voir si la Grande coalition n’arriverait pas à proposer quelque chose d’un peu raisonnable, est de plus en plus battue en brèche. Et la volonté de ne pas attendre, de prendre soi-même les choses en mains, se renforce.

Un salaire minimum de 7,50 euros

La détermination d’un salaire minimum à 7,50 euros est un signe notable. Voir le DGB s’opposer aussi clairement aux bas salaires est un progrès. Il y a trois ans, le rejet de cette proposition était encore majoritaire, et l’IG Metall, le principal syndicat industriel, était très sceptique à ce propos. Entre-temps, le DGB a organisé des discussions entre les différents syndicats qui ont débouché sur un compromis acceptable. Tous les syndicats sont d’accord pour considérer qu’en dessous de 7,50 euros, rien ne se pourra se faire.

La proposition mentionne toutefois qu’il existe différentes formes de réglementation du salaire minimum. Cela peut être par le truchement d’une loi, cela peut passer par la déclaration de force obligatoire de conventions collectives ou encore, solution préconisée par l’IG Metall, par l’introduction d’un salaire minimum au niveau d’une branche économique, la mesure concernant alors les classes inférieures des grilles salariales conventionnelles.

Mais tous les syndicats s’accordent à reconnaître que, là où les syndicats n’ont pas la force nécessaire ou que les conventions collectives sont inopérantes, des dispositions légales sont nécessaires. Ce qui implique aussi que dans les branches et les secteurs où les syndicats sont suffisamment puissants pour obtenir de meilleures conditions, des salaires minimaux plus élevés sont possibles.

D’après Sozialistische Zeitung, juin 2006
(adaptation et traduction de la rédaction)


Quel montant pour un salaire minimal?

En Allemagne, pays qui compte sept millions de travailleurs et travailleuses touchant des bas salaires (soit le 21% des salarié-e-s), la limite moyenne de la pauvreté s’établit à un salaire horaire de 9,83 euros à l’Ouest et de 7,15 euros à l’Est; les normes européennes, elles, arrivent à 7,38 euros à l’Ouest et 5,37 euros à l’Est. La revendication du DGB doit aussi se comprendre à partir du fait que plus de 130 conventions collectives contiennent des tarifs horaires inférieurs à 6 euros. (voir Erika Biehn, Wie hoch muss ein Mindestlohn sein? Sozialistische Zeitung, mai 2006)