Une génération qui paiera pour avoir du boulot?

Une génération qui paiera pour avoir du boulot?

Avec l’adoption du CPE, en France, la précarisation des jeunes, dans le monde du travail, devient la norme. C’est pour cela que ces (futur-e-s) travailleurs-euses sont descendus dans la rue en début d’année. Toute l’UE connaît cette précarisation et la Suisse n’est pas non plus épargnée. Emplois sous-payés (1000 euros), stages non rémunérés sont le lot de milliers de jeunes diplômé-e-s. Cette dégradation des conditions de travail va encore être accentuée par la directive Bolkestein. Petit tour d’horizon dans différents pays.

En France, le chômage des jeunes représente un grave problème depuis de longues années. Les mesures décidées pour y remédier n’apportent pas les effets escomptés et fragilisent la situation des personnes. Le droit du travail se trouve démantelé petit à petit pour répondre à la demande de flexibilité et de rentabilité du marché du travail. Les offres de contrat à durée indéterminée sont remplacées par des contrats précaires ou des stages. Le Conseil Economique et Social estime à 800000 le nombre de stagiaires chaque année. Les employeurs ne sont pas obligés de les payer. Il ne s’agit plus, dans ce cas, de stages mi-pédagogiques, mi-professionnels, mais bien d’occupations de véritables postes de travail. Des stagiaires se succèdent parfois indéfiniment sur un même poste, remplaçant ainsi un-e salarié-e permanent. Les conséquences de ce système sont multiples et touchent tous les domaines: difficultés d’insertion, infantilisation durable des jeunes adultes, problèmes psychologiques par manque de reconnaissance, dumping salarial et social, précarisation générale des salaires et des conditions de travail, soutien financier de la famille, accentuation des inégalités sociales.

En Espagne, seuls 40% des diplômé-e-s de l’enseignement supérieur ont un emploi correspondant à leur niveau d’études. Le chômage atteint 11.5% chez les diplômé-e-s de 25-34 ans. Paradoxalement, l’Espagne n’a jamais eu une génération aussi bien formée que celle-ci, les parents ayant encouragé leurs enfants à poursuivre les études, pensant que ça serait une garantie pour trouver un emploi stable et intéressant. Les jeunes, qui ont un travail, sont nombreux à ne toucher que 1000 euros par mois. Difficile de vivre avec cette somme et impossible de faire des projets.

En Italie, d’après l’Institut national de statistique, un quart des salarié-e-s a un contrat de travail différent du contrat standard à durée indéterminée. Deux tiers de ces travailleurs-euses n’ont connu que ce type de contrat. Les trois-quarts touchent moins de 1000 euros par mois. La nombre de jeunes, de plus de 30 ans, qui vivent encore chez leurs parents a augmenté de 25% et un-e salarié-e sur six, de plus de 35 ans, loge au domicile parental.

En Allemagne, les attaques portent surtout contre les salarié-e-s les plus âgés. Une personne au chômage sur quatre a plus de 50 ans. Sur pression des entreprises, le gouvernement allemand a instauré une période d’essai de deux ans pour ces salarié-e-s. La Cour européenne de justice a renvoyé sa copie à l’Allemagne en invoquant une discrimination inacceptable. Nul doute que le gouvernement Merkel a encore de l’imagination pour réduire les droits des travailleurs-euses.

Dans le domaine de la précarisation, la Suisse n’a rien à apprendre de ses voisins. Nous y reviendrons…

Marie-Eve TEJEDOR