Assurance maternité, une première victoire

Assurance maternité cantonale


Une première victoire


Depuis le rejet de l´assurance maternité en votation fédérale le 13 juin 1999, le mandat constitutionnel de 1945 reste une nouvelle fois sans concrétisation, suite aux deux précédents refus populaires de 1984 et 1987. Alors qu´au plan international, les milieux néo-conservateurs attaquent la Convention 103 de l´Organisation internationale du travail (OIT) sur la protection de la maternité, pour remettre en cause et réduire la portée du texte de 1952, un front anti-social de la même cuvée a gagné le référendum sur le dernier projet d´assurance maternité pourtant déjà revu à la baisse en comparaison des précédents textes refusés en votation.


Par Gilles Godinat


Suite à ce nouvel échec, huit interventions parlementaires concernant l´assurance maternité ont été déposées aux Chambres fédérales: pour prolonger la durée de paiement du salaire dans le code des obligations (Motion Hafner pour 14 semaines, motion Spoerry pour 8 semaines); pour bloquer les cotisations perte de gain (APG) sur un compte ad-hoc (motion Goll); pour modifier le droit des assurances sociales et privées, soit pour relancer la proposition au niveau des cantons (Interpellation Roth-Bernasconi). Les réponses du Conseil fédéral en automne 1999 ont permis au collectif de femmes qui s´était mobilisé pour soutenir l´assurance maternité à Genève d´envisager une loi cantonale en la matière.


Le vote genevois ne laisse en effet planer aucun doute sur la volonté populaire: 74,3% des votant-e-s ont soutenu la loi sur l´assurance maternité. Raison pour laquelle le collectif a repris l´essentiel du texte fédéral, en élargissant toutefois la durée d´indemnisation à 16 semaines, comme en France et en Autriche, en sachant que d´autres pays européens vont bien au delà. Pour le reste, le projet des femmes reprend l´idée de la compensation de gain à 80% du dernier revenu d´activité selon le modèle AVS.


La droite muselée


Dans ce projet cantonal, seules les femmes bénéficiant d´un revenu assuré pendant au moins trois mois peuvent recevoir les prestations d´assurance maternité. Ceci constitue évidement un important retrait par rapport à la loi de 1999 qui prévoyait également une couverture pour les femmes ne travaillant pas et dont le revenu familial ne dépassait pas 72 360 Fr. par an. La revendication de 16 semaines est d´autant plus justifiée.


Préparé avec la participation de femmes des partis de l´Entente, le projet de loi devait être soutenu par un front large. Malheureusement, la gauche et les Verts se sont retrouvés sans appui de la droite lors du dépôt du projet en mars, découvrant qu´une mouture version Entente était déposée le même jour au Grand Conseil. En commission des affaires sociales, la volonté d´aboutir rapidement à un projet commun a marqué le début des travaux. Alors que les députés avaient demandé un avis de droit sur la faisabilité via les caisses de compensation AVS, le Conseil d´Etat, inspiré par le projet de la gauche et des Verts, dépose son propre projet de loi à la rentrée d´automne. Cette nouvelle version, après quelques remous, a permis de trouver un terrain d´accord entre les deux fronts. Le projet voté à l´unanimité en commission à la fin octobre reprend toutes les revendications du projet du collectif pour l´assurance maternité. La seule concession concerne la participation financière des indépendants, résultat d´une négociation serrée en commission. En fait, c´est le modèle AVS qui l´a emporté avec une participation progressive des indépendants en fonction de leurs revenus.


Relancer une bataille nationale


Ce premier résultat peut être considéré comme une victoire des femmes, et l´adoption du projet au Grand Conseil concrétisera la volonté populaire. Des bruits de couloir font planer la menace référendaire, notamment dans les rangs de l´UAPG, mais ce projet, soutenu en commission par toutes les forces politiques du parlement, a très peu de risque d´être refusé par le peuple. Il permettra au contraire d´affirmer à Genève la volonté exprimée en juin1999, et ainsi de relancer le débat pour une véritable assurance maternité digne de ce nom au plan fédéral. Si ce projet entre en vigueur, cela donnera du poids aux citoyennes et citoyens de ce pays qui ne veulent pas d´une solution au rabais, limitée par exemple au seul code des obligations.