Affaire du 25 rue du Stand: Christian Ferrazino nous répond

Affaire du 25 rue du Stand: Christian Ferrazino nous répond

Depuis quelques semaines, l’achat par la ville d’un immeuble pour son administration à la rue du Stand est au centre d’une polémique dirigée principalement contre Christian Ferrazino, Conseiller administratif de la Ville de Genève élu sur la liste ADG (solidaritéS et Indépendants). Mauvais choix, erreur grossière de gestion, erreur politique, comme on peut le lire tous les jours dans la presse? Mais peut-être aussi, tentative de déstabilisation d’un magistrat qui dérange la droite et parfois même la gauche?

Le Conseil administratif a fait une erreur politique en ne présentant pas un crédit de rénovation au Conseil municipal et en utilisant des crédits courants. On sait qu’un certain nombre d’erreurs techniques ont été commises par les fonctionnaires en charge de l’estimation des travaux de rénovation. Ce que le battage médiatique mais aussi le battage politique insinuent, c’est finalement un comportement malhonnête du Conseil administratif.

Oui, le Conseil administratif a commis une erreur politique en utilisant le budget de fonctionnement. La motivation principale de cette manière de faire était de ne pas laisser l’immeuble vide plus longtemps et non pas d’éluder le Conseil municipal. Cela dit, ce dernier aurait dû être avisé beaucoup plus rapidement.

Il est vrai également que des erreurs d’appréciation sur l’ampleur des travaux ont été commises par le groupe de fonctionnaires qui, en été 2003, a examiné l’immeuble de la rue du Stand et qui a considéré que l’administration municipale pouvait y emménager sans engager d’importants travaux. Nous savons aujourd’hui qu’avant le vote d’acquisition de l’immeuble par le Conseil municipal des informations importantes quant à l’ampleur des travaux de rénovation, plusieurs millions, ont été cachées au Conseil administratif qui n’a ainsi pas pu en faire état au Conseil municipal au moment du vote.

Cependant, laisser croire qu’il y a eu malhonnêteté de la part du Conseil administratif ou d’un de ses membres relève d’une basse manœuvre qui n’a rien à voir avec la réalité du dossier.

Les estimations de la valeur du bâtiment constituent une source inépuisable de polémiques. Ne s’agit-il pas pourtant d’une question surtout technique?

La polémique sur le prix de l’immeuble trouve sa source dans le montant du prix de la prétendue vente précédente, 16 millions de francs. Or, il ne s’agissait pas d’une véritable vente mais d’un prix convenu lors d’une fusion entre deux identités bancaires. Une sous-estimation de la valeur vénale du bâtiment apportait un gain au plan fiscal, que cet avantage ait été voulu ou obtenu par erreur.

De son coté, la ville a commandé une expertise à un bureau connu de la place qui a évalué le bâtiment à 26 millions. Notons que l’expertise commanditée ultérieurement par le contrôle financier arrive à une évaluation de 27,2 millions plus ou moins 10%. Ainsi la négociation finale à 30 millions reste à hauteur de ces expertises. Enfin, l’Etat a été amené à préciser que le prix négocié par la ville n’était pas exagéré.

Toutes les informations concernant cette affaire sont connues, en particulier du monde politique, depuis plus d’une année. Comment expliques-tu le déclenchement, il y a quelques semaines, de ce que tout le monde appelle maintenant le scandale de la rue du Stand?

Tout le monde possédait les informations essentielles de ce dossier depuis plus d’une année, notamment les membres du Conseil municipal. Or, le rapport d’audit du contrôle financier municipal a été remis, il y a seulement quelques semaines, à la commission des finances, soit juste après l’échec des deux listes de l’Alliance de gauche à l’élection au Grand conseil et au début de la campagne pour l’élection au Conseil d’Etat. La campagne médiatique, avec quantité de chiffres faux ou gonflés, de déformations et de médisances, visait manifestement à écraser la gauche de la gauche et à affaiblir l’ensemble de l’alternative. Certains représentants de la droite ont su habilement créer une avalanche médiatique et créer une polémique disproportionnée avec les données réelles de ce dossier.

Tu es accusé d’avoir acheté un mobilier luxueux à grand prix pour t’y installer personnellement.

Je n’avais pas du tout l’intention de déménager à la rue du Stand. Ce n’est qu’en juin dernier que, sur l’insistance de mes chefs de services, j’ai changé d’avis. Le mobilier a été acheté pour les services et leur personnel et non pour la direction du département ou pour moi-même. En ce qui me concerne, je déménagerai avec le mobilier de mon bureau actuel.

Par ailleurs, le mobilier USM est le plus durable et le plus modulable qui soit. Il reste intact quarante ou cinquante ans. Cela dit, je prends toute la responsabilité quant au choix de ce mobilier, cette décision m’appartenant pleinement et non pas au Conseil administratif.

Cette affaire va-t-elle être l’occasion de modifier les procédures pour aller vers plus de transparence mais aussi pour mieux contrôler les effets de dysfonctionnements qui existent et existeront toujours dans une administration importante?

Oui, d’abord il est primordial de mieux définir, avec le Conseil municipal, les conditions d’utilisation de la ligne budgétaire consacrée à l’entretien des immeubles de la ville. Il faut savoir que cette ligne oscille entre 26 et 30 millions par année, ce qui correspond pour ce seul service à plus de 10000 factures annuelles.

Je proposerai de rencontrer plusieurs fois par année la commission des travaux pour examiner l’utilisation de cette ligne et pour décider de ce qui doit faire l’objet d’un crédit ad hoc et de ce qui correspond aux travaux d’entretien proprement dits.

D’autre part, cette affaire me conforte dans la réorganisation que j’ai engagée de mon département depuis 2004 et qui vise à renforcer une direction collégiale permettant une gestion par projet, le but recherché étant avant tout d’éviter les dysfonctionnements qui ont pu apparaître dans le cadre du dossier de la rue du Stand

Certains disent que le bâtiment de la rue du Stand fait perdre beaucoup d’argent à la Ville. D’autres affirment que c’est une bonne affaire.

A moyen terme, il s’agit effectivement d’une bonne affaire. Nous devions absolument trouver un grand bâtiment pour regrouper des services qui étaient dispersés. Par ailleurs, les dépenses supplémentaires, de l’ordre de 7 millions et demi, seront très rapidement compensées par les rocades des services qui déménagent. Il y aura ainsi des loyers à des privés qui seront supprimés et des loyers encaissés par la Ville dans les bâtiments dont elle est propriétaire. Si l’on se réfère au rapport du Contrôle financier l’économie sur 5 ans est de plus de 6 millions de francs.

Entretien réalisé
par Jacques FRANÇOIS