Requérants déboutés: souffrance et mort dans nos rues

Requérants déboutés: souffrance et mort dans nos rues

A Genève, John Wallas, requérant d’asile libérien débouté et exclu des foyers d’hébergement, est mort dans la rue après un mois d’errance. Ce que les associations de solidarité avec les requérant-e-s d’asile dénonçaient depuis avril 2004 est arrivé.

Auditionnés le 1er septembre par la commission sociale de la Ville, Michel Ottet, d’ELISA-ASILE, Jean-Pierre Zurn, de l’AGORA, et Yves Brutsch, du Centre social protestant, estiment que 600-700 personnes errent dans les rues à Genève, sans aide.

L’aide d’urgence du Canton ne garantit pas un minimum de dignité humaine. Les locaux mis à disposition, jouxtant l’aéroport sont difficiles d’accès et exposés à toutes les nuisances.1 L’aide financière de 15 Fr. par jour n’est distribuée qu’à l’Office cantonal de la population (OCP), et ne vaut que pour la nourriture et non pour acheter des objets d’hygiène, dentifrice, savon, etc. ou des habits. Les soins dentaires et médicaux courants sont refusés. De plus, l’OCP accorde ce semblant d’aide en disant aux requérant-e-s: «Vous devez disparaître» . Pas étonnant donc, que seuls 10% d’entre-eux s’aventurent auprès de l’OCP. Les autres sont «dans la nature» . Des compatriotes les hébergent parfois…

Mais le jeune Libérien – qui ne pouvait pas être expulsé! – trouvé mort le 13 septembre était devenu alcoolique et violent, certainement fou de désespoir. Vu son état, on comprend qu’il n’ait pas trouvé d’ami pour lui offrir l’hospitalité. Aucune structure de santé psychique n’est en place. Ainsi, nous côtoyons sans les voir des gens sombrant en enfer, sans-abris, malades, poussés à la délinquance, pour survivre.

Des élus de la Ville de Genève, entraînés par notre camarade Jacques Mino, se sont préoccupés de cette situation inacceptable, due à la politique inhumaine de la droite à Berne. La Confédération se targue d’avoir limité ses dépenses sur l’asile, en diminuant les moyens alloués aux cantons. «Quelles solutions?» ont demandé les municipaux genevois… D’abord reconnaître que le dispositif actuel est clairement en dessous du minimum vital­­ et le relever d’urgence. On devrait aussi offrir des possibilités de travail à ces personnes, ce qui leur rendrait un peu de dignité, et des soins décents, y compris psychiques. Surtout, l’Exécutif de la Ville devrait intervenir auprès des Chambres pour demander l’abrogation de ces mesures, et auprès des autorités du canton pour qu’elles subviennent décemment aux besoins de ces personnes laissées à l’abandon.

La situation n’est pas meilleure dans d’autres villes. A Soleure par exemple, Françoise Kopf de SOS Racisme a recueilli ce témoignage:

«Ce mardi, 14 septembre une personne «NEM» arrêtée puis relâchée, nous a dit être restée 24 heures en prison, sans une goutte d’eau ou de la nourriture. Elle a été rouée de coups en prison, par trois gardiens auxquels elle avait fait appel pendant la nuit, demandant des soins parce qu’elle était malade et avait de la fièvre (nous avons vu les séquelles des coups). Le billet de 20 Fr. que la victime portait sur elle, soit tout le montant de l’aide d’urgence qui lui restait, a été déchiré par les «gardiens de l’ordre»…» . D’autres requérants arrêtés par la police soleuroise ont été parqués dans les WC!

Maryelle BUDRY

Pour être informé-e sur la défense du droit d’asile, s’abonner au bulletin romand «Vivre ensemble» Case postale 171 1211 Genève 8, tél: 022 320 60 94, www.asile.ch/vivre-ensemble

  1. v. solidaritéS no 69