La mort à quinze ans

La mort à quinze ans

André Rossel-Kirschen
Entretiens avec Gilles Perrault, Paris, Fayard, 2005.

«J’ai été peut-être le plus jeune résistant à avoir commencé la lutte armée dès 1941», voilà ce que révèle André Rossel-Kirschen à l’écrivain français Gilles Perrault au cours d’un entretien passionnant qui nous plonge dans les premières actions de la résistance communiste à l’occupation nazie de la France.

André Rossel-Kirschen est né en Roumanie, en 1926. Afin d’échapper à l’antisémitisme, sa famille, d’origine juive, vient s’établir en France. Enfant précoce, âgé d’une dizaine d’années, il est membre du club des Amis du Front populaire. A l’été 1940, encore adolescent, il rejoint un groupe communiste clandestin; de très jeunes militants qui deviendront le fer de lance des premières actions armées contre l’occupant. «Comme la plupart de mes camarades, je détestais la guerre, j’étais profondément pacifiste. Mais il se trouve que nous étions en guerre et qu’une guerre ne se fait pas à moitié».

En 1940, le Parti communiste français est paralysé par la signature du Pacte germano-soviétique, une période sombre: il cherche à obtenir les faveurs de l’occupant en demandant la légalisation de son journal l’Humanité. Après l’invasion de l’URSS par les armées d’Hitler, en juin 1941, les militant-e-s communistes se lancent cependant dans la lutte. Au mois d’août 1941, André Rossel-Kirschen fête ses quinze ans. Le 10 septembre, dans le métro parisien, il abat un officier allemand: «J’étais à deux mètres de lui, il est tombé comme une masse. J’ai mis quelques secondes à réaliser».

Les premières organisations de résistance étaient dépourvues d’expérience en matière de lutte clandestine. Le groupe auquel appartenait André Rossel-Kirschen sera rapidement démantelé, ses membres seront systématiquement torturés par la police française ou allemande. L’un d’eux, Carlo Schoenhaar, était de mère suisse. Après un simulacre de procès, tous seront fusillés, sauf André Rossel-Kirschen qui échappe à la peine capitale du fait de son âge. Il sera déporté en Allemagne. Jusqu’à la Libération, la nuit sera longue pour lui!

Loin des récits légendaires sur la Résistance, ces entretiens font revivre les premiers pas de ces militants qui compensèrent leurs faiblesses en matière d’organisation et d’armement, par un courage inouï!

Daniel KUNZI