Sans-papiers vaudois: faire disparaître les clandestins?

Sans-papiers vaudois: faire disparaître les clandestins?

Droit dans ses bottes, le Conseil d’Etat vaudois s’est récemment fendu d’un communiqué de presse qui vaut son pesant de mépris bureaucratique. Sous l’impulsion de l’udéciste Jean-Claude Mermoud,il a précisé sa politique à l’égard des clandestins. Reprenant le couplet des flics en faction, le gouvernement vaudois affirme: «Circulez, il n’y a rien à voir!».

Alors que l’étude menée par l’Institut de recherche gfs de Berne conclut à la présence de 12000 à 15000 clandestin-e-s dans le canton de Vaud (10 à 20000 pour le Collectif vaudois de soutien aux sans-papiers), le Groupe de travail sur les clandestins vient d’être dissout, après avoir rendu son rapport final. Autrement dit, au moment où la question des sans-papiers est en quelque sorte officialisée, Mermoud et ses collègues estiment, pour l’essentiel, en avoir assez fait. Sur les sans-papiers, le DIRE (Département des institutions et des relations extérieures) n’a plus rien à dire. Plus de groupe de travail, plus de sans-papiers!

St-Christophe,
patron des sans-papiers

Mieux encore, la truffe humide et la queue frétillante, le gouvernement vaudois joue au bon chien-chien de son maître Blocher et décide de «renoncer à présenter à l’ODM (Office fédéral des migrations) des demandes de régularisation qui manifestement ne correspondent pas à la pratique rigoureuse des autorités fédérales et n’ont aucune chance d’être acceptées». Ce qui revient quasiment à fermer la porte à tout octroi d’une autorisation de séjour. Et la voix vibrante de tant de générosité, l’exécutif ajoute, grand seigneur «le Conseil d’Etat rappelle sa décision du 11 juin 2003, selon laquelle les clandestins dont la demande de régularisation est en examen sont autorisés à séjourner dans le canton jusqu’à la fin de la procédure». Au cas où certains prendraient cela pour une faiblesse excessive, une précision s’impose: «sauf dans les cas manifestement infondés, abusifs ou d’expulsion judiciaire». Manifestement, le Conseil d’Etat aime beaucoup l’adverbe manifestement. Tout ce qui est manifeste n’ayant pas besoin d’être démontré, c’est en effet toujours ça de gagné pour l’arbitraire administratif.

Cette politique est d’un jésuitisme achevé. Tout le monde sait que ces prétendus clandestins sont là et bien là, qu’ils cotisent aux assurances sociales, que leur salaire est souvent imposé à la source par les autorités fiscales, que leurs enfants sont scolarisés et qu’ils ou elles travaillent ici, dans l’hôtellerie, la restauration, l’agriculture, la construction, le nettoyage et les soins aux personnes. Tout le monde, sauf, manifestement, les autruches qui nous gouvernent.

La répression comme seule politique

Cette politique n’est plus que répression, le «moratoire» vaudois se réduisant ainsi comme peau de chagrin; la seule issue laissée par les autorités étant celle du départ forcé. Comme en témoigne leur refus de soutenir la proposition du canton de Genève de régularisation de 5000 employé-e-s domestiques sans-papiers.

Cette politique est aussi la marque d’un exécutif sans courage, qui tente de faire passer sa proposition de mise sur pied «d’une assistance en nature (…) pour les personnes en situation irrégulière indigente» pour une preuve d’audace, alors qu’elle n’est que méprisante. Les sans-papiers ne quémandent pas, ils ne mendient pas, ils veulent simplement qu’on reconnaisse leur existence et qu’ils puissent bénéficier des droits accordés à tous ceux et toutes celles qui travaillent dans ce pays.

Contre cette politique, qui abandonne ces personnes à l’absolue précarité, à qui l’ont dénie le droit d’obtenir un permis de séjour, le Collectif vaudois de soutien aux sans-papiers a appellé à manifester le mercredi 18 mai, à la Place de la Palud à Lausanne. Ni aumône, ni renvois: régularisez tous les sans-papiers!

Daniel SÜRI