Une majorité de gauche pour une politique du centre?

Une majorité de gauche pour une politique du centre?

La gauche majoritaire s’apprête à mener une politique du centre. solidaritéS perd un de ses deux sièges au Grand Conseil. Entrée en force de l’UDC au Parlement. Voici les principaux résultats des élections neuchâteloises. Au niveau cantonal, en terme de bulletins, solidaritéS maintient son score, du fait que nous nous présentions cette fois-ci aussi à la Chaux-de-Fonds, mais recule à Neuchâtel, de 6,4% à 4,7%. De son côté, le POP recule de 5,8% à 4,5% dans le canton (de 3,9% à 3% à Neuchâtel, de 13,6% à 9,8% à la Chaux-de-Fonds). Les deux listes paient l’absence d’unité au sein des forces qui se revendiquent de la coalition nationale «A Gauche Toute!». Nous l’avions regretté. Il faudra y revenir!

L’objectif de Solidarités était la conquête d’une majorité de gauche au Parlement et à l’Exécutif, pour battre la droite et imposer une autre politique. Cela impliquait aussi le renforcement de sa présence au Grand Conseil. La droite a été battue et la gauche sera majoritaire – ça fait du bien, depuis le temps qu’on l’attendait – mais la gauche critique recule.

Résultat des élections au Grand Conseil

Parti Socialiste 41 sièges (+2)
Les Verts 10 sièges (+3)
Parti Ouvrier Populaire 6 sièges (-1)
Solidarités 1 siège (-1)
Parti Libéral 25 sièges (-10)
Parti Radical 15 sièges (-10)
UDC 17 sièges (+17)

Le Grand Conseil (législatif) se retrouvera, donc pour un siège (58 contre 57), avec une majorité de gauche et l’exécutif, finalement élu tacitement, est également à gauche.Il est à relever qu’aucune femme n’ a été élue.

Les Verts sortent renforcés de ces élections. Ils bénéficient de la popularité de leur candidat au Conseil d’Etat, Fernand Cuche, et, plus généralement, de leur progression au niveau national. Solidarités recule et perd un des deux sièges que nous avions obtenus dans le district de Neuchâtel. Dans les districts de Boudry et Chaux-de-Fonds, nous n’atteignons pas les 4% nécessaires à l’obtention d’un siège.

Quel changement
de politique?

L’objectif de Solidarités est de faire progresser la conscience sociale et l’engagement pour un changement réel.

Mais ces élections se sont déroulées dans un contexte difficile, dominé par la problématique de l’endettement de l’Etat et par la nécessité affirmée de toutes parts de faire des économies. Soliarités et le POP ont mené leur campagne sous un autre angle: de l’argent il y en a, il faut la volonté politique d’aller le chercher là où il est…

Nous sommes partisan-e-s d’un autre monde, qui passe par une redistribution des richesses et une priorité à la politique sociale.

Bien que la gauche est sortie majoritaire des urnes – c’est une première historique -, l’espace parlementaire pour promouvoir une telle politique semble réduit. Le message majoritaire des électeurs/trices de gauche pourrait se résumer ainsi: « Faites de votre mieux, mais un autre monde, ce n’est pas pour demain…».

Percée de l’UDC
au Grand Conseil

Ce parti a confirmé ses résultats des élections nationales et communales; il ne progresse pas, mais se stabilise à un haut niveau. Il prend toutes ses voix chez l’électorat radical et libéral, attisant une dérive policière et xénophobe dans le canton. Son échec au Conseil d’Etat traduit bien le fait qu’il a gagné un électorat fidèle, mais qu’il n’obtient que très peu de voix en-dehors de ses rangs. Avec ses 17 élus (uniquement des hommes) il va peser dans les débats du Grand Conseil. Mais la majorité de gauche devrait permettre de faire obstacle à ses propositions réactionnaires sur lesquelles il compte bien tirer l’ensemble du camp bourgeois.

Consensus, consensus…

Dans les réactions post-électorales des partis, à gauche comme à droite (encore plus au PS qu’à droite), il n’y a plus une phrase qui ne contienne ce mot magique. Tout doit redevenir comme du temps où l’on pouvait se vanter urbi et orbi de vivre un consensus bien neuchâtelois! Tout, du moins, est préparé pour cela.

A la veille des élections, le Grand Conseil a voté à une large majorité (à l’exception des député-e-s de solidaritéS, du POP et des Verts) un décret modifiant la constitution cantonale (maîtrise des finances / limites de l’endettement et des recettes). Ce décret, soutenu par le PS et la droite, prévoit la nécessité d’une majorité des 3/5e du Parlement pour toute dépense ou tout nouvel impôt dépassant 5 millions. Par ce mécanisme, la droite – qui a vidé les caisses de l’Etat en octroyant des faveurs aux plus riches du canton (à la majorité simple) – se donne les moyens de bloquer tout projet qui chercherait à rétablir un peu de justice fiscale; la réduction de la dette devra se faire uniquement sur le dos du personnel et par des réductions des prestations de l’Etat. De même, tout investissement ambitieux devra avoir l’aval de la droite.

Du pain sur la planche

Ce dispositif nécessite un changement de la Constitution. Il sera soumis au vote le 5 juin. Solidarités appellera à voter NON. Qui, de la gauche majoritaire au parlement nous suivra? On verra. Mais une chose est sûre: le travail ne manquera pas pour toutes celles et ceux qui sont engagés dans la défense de la justice sociale et de l’égalité. Le syndicat du personnel des services publics peut se préparer à devoir se défendre rudement.

A peine les élections terminées, nous voilà à nouveau mobilisés: le 5 juin, deux objets de politique cantonale s’ajouteront aux objets nationaux. Deux dossiers qui requièrent tout notre engagement:

  • Le vote de la nouvelle loi sur les établissements hospitaliers (EHM) qui prépare la privatisation par morceaux du système hospitalier et l’introduction de contrats de droit privé pour l’ensemble du personnel de la santé
  • Le vote sur la maîtrise des finances, annonce d’une politique d’austérité dont les plus faibles feraient inévitablement les frais.

Solidarités côté rue a du pain sur la planche. Notre députée au Grand Conseil, Marianne Ebel, aussi. Bref, la gauche de gauche continue son combat.

Henri VUILLIOMENET