Chroniques caissières

Chroniques caissières

Eugénie Boillet, Editions D’En Bas, 2004, Lausanne, 124 p.

Les caissières font presque partie de notre vie intime et, dans le même temps, lorsque nous cherchons, à connaître un petit peu mieux leur vie, leur mode de travail qui en fait des machines humaines nous met beaucoup de bâtons dans les roues.

Alors que les annonces publicitaires des hauts parleurs de supermarché nous parlent des saisons du dehors qui se succèdent, l’une de ces caissières nous décrit, sur le ton de la tragi-comédie et avec des élans de tendresse pour ses compagnonnes et compagnons d’infortune, le rythme impitoyable des caisses, les monotones «Vous avez la carte Gobi?», les pauses qui n’en sont jamais, les contacts découragés avec les collègues. Un gérant automate à la recherche perpétuelle d’une augmentation du chiffre d’affaires essaie de les faire participer pour du chocolat à ses concours dérisoires. Les appels au préposé à la machine à bouteilles et à tout faire se répètent et s’amplifient. La caissière en cheffe, immigrée si fière de sa promotion mais restée si proche, est remplacée: son style et ses cheveux flamboyants ont été jugés trop vulgaires par un client ancien vendeur nostalgique et inquisiteur.

Musicienne de profession, la jeune romancière vaudoise a conçu son très bon premier livre comme une partition d’orchestre où les voix des employées, des clients – souvent inattentifs ou désagréables, les lettres de plaintes d’une clientèle parfois étrange interviennent avec beaucoup de rythme et de personnalité. Le seul regret que je pourrais formuler est que l’éditeur n’ait pas opté pour une mise en page différente qui aurait mieux mis en valeur le texte et peut-être aussi son message.

Marie-France PERRAUDIN