Zeba : La grève a payé !

Zeba: les travailleuses/eurs n´ont pas marché…


La grève a payé !


Mercredi 29 novembre, 80 salarié-e-s de la Zeba AG à Bâle, en grande majorité des femmes, se sont engagé-e-s dans une grève de durée indéterminée contre des réductions de salaires pouvant aller jusqu’à 700 Fr. par mois pour des personnes gagnant 4000 Fr. bruts.


Au deuxième jour de la grève – lancée ensemble par le SIB et le SSP – le gouvernement bâlois déclarait les grévistes dans l´illégalité – suite à une plainte de l´entreprise – et envoyait sa police contre les piquets bloquant l´accès à la Zeba, pour arrêter toute entrave à la «liberté du travail».Une «liberté» conçue par l´employeur comme celle de signer les acceptations individuelles de baisses de salaires, signifiées par lettres à chacun-e, sous peine d´être licencié-e en cas de refus !


Au quatrième jour, ayant polarisé une grande attention des médias, une sympathie générale dans l´opinion et un élan de solidarité traduit notamment par la manif du 2 décembre, lors de laquelle ont parlé des dirigeants syndicaux nationaux (V. E. Decarro ci-contre), les grévistes acceptaient un accord représentant une victoire importante contre la fatalité marchande!


Promesses non tenues


L’entreprise Zeba AG est l’ancienne blanchisserie cantonale bâloise, privatisée en 1994. Le canton en reste l’actionnaire principal (à 70 %), et elle traite toujours le linge des hôpitaux bâlois, mais aux «conditions du marché».


A l’époque, l’Etat avait promis que conditions de travail et acquis sociaux seraient préservés malgré la privatisation, mais le personnel a déjà subi des baisses de salaires, dont la dernière de 7% en 1998, était acceptée pour aider à sortir l’entreprise d’une situation déficitaire.


Un militant SSP président de la commission d´entreprise s’était vu, il y a quelques années, exclu de sa qualité de représentant du personnel pour avoir informé les salarié-e-s que le conseil d’administration où il siégeait voulait réduire les salaires, fait considéré comme «violation du secret de fonction».Début 2000, la Zeba, par la voix de la présidente de son Conseil, Veronica Schaller, membre PS du gouvernement bâlois, annonçait une nouvelle baisse, de 1000 Fr. sur des salaires de 4000 Fr. bruts, pour 68 anciennes employées.


Un 8 mars de lutte


Un jour de grève eut lieu le 8 mars, contre la mesure, puis les mois de négociations n´ont pas abouti, l´entreprise et le canton brandissant un rapport d’expert disant que l’entreprise ne serait «compétitive» qu’avec des salaires réduits. Les salaires de la branche -souvent inférieurs à 3000 Fr. par mois – étant invoqués pour appuyer cet avis.


Après une tentative de médiation, l’Office de conciliation a recommandé de «ramener» la baisse des salaires à 700 Fr. pour des salaires déjà bas, soit jusqu’à 16 % de réduction, mais 1% seulement pour les cadres.

A signaler que le SIB et VPOD à Bâle ont lancé il y a peu une initiative pour la «réétatisation» de l’entreprise…


L´accord qui vient d´être conquis de haute lutte comprend 30 postes mis à disposition pendant deux ans par l´Etat pour d´éventuels transferts volontaires d´«anciens» de la Zeba, deux ans sans aucune baisse de salaire, puis une réduction de 4% seulement s’il reste alors plus de 25 employé-e-s aux anciennes conditions, des augmentations de salaires minimums dans l’entreprise (3000 Fr.) de + 200 Fr. au 1er janvier 2000, + 100 fr en 2002 et + 100 Fr. en 2003, ceci en plus d´une indexation garantie pour 3 ans, le retrait de toutes les plaintes et menaces, des procédures internes réduisant l´arbitraire patronal, une stricte limitation du nombre de contrats à durée déterminée…


(pv)






Monde du travail


Non au diktat du marché !


Nous publions ici le discours d´Eric Decarro, président du SSP/Vpod, lors de la manifestation de soutien aux grévistes de la Zeba, samedi 2 décembre, à Bâle.Je tiens à exprimer le plein soutien du syndicat des services publics SSP/VPOD à la grève du personnel de la Zeba. Nous considérons que c’est une honte de vouloir imposer des réductions de salaire de 700 francs par mois à des travailleuses et travailleurs qui gagnent 4000 francs bruts. Nous n’acceptons pas ces réductions de salaires au moment où nous revendiquons partout la pleine compensation du renchérissement et des augmentations générales de salaires, dans cette période de reprise économique.


Il est indigne d’invoquer les normes du marché pour imposer des réductions de salaires de 16% à des personnes qui travaillent parfois depuis 30 ans et qui ont donné le meilleur d’elles mêmes à l’entreprise pendant cette période de leur vie ! Le directeur de la Zeba dit qu’il est nécessaire de baisser les salaires pour que l’entreprise puisse se maintenir dans la concurrence. Et le rapport d’experts débouche sur la même conclusion. Nous n’acceptons pas un pareil cynisme.


Qu’est-ce que c’est que cette société où l’on voudrait, pour qu’une entreprise survive sur le marché, imposer à des salariées et salariés qui travaillent de plus en plus dur, des salaires qui ne permettent pas de vivre décemment ? Nous n’acceptons pas que le travail, qui est à l’origine de la grande majorité des valeurs économiques, soit considéré comme une marchandise ordinaire, soumise à la loi de l’offre et de la demande.


Nous n’acceptons pas que des salarié-e-s doivent subir des amputations massives de leur revenu et que leur travail soit méprisé, alors que les profits des entreprises explosent et que des spéculateurs peuvent s’enrichir en un temps record.


Cette grève pour les salaires est aussi une grève pour la dignité, pour la reconnaissance du travail et pour la justice sociale. Nous refusons la recommandation de l’Office de conciliation qui voudrait imposer des baisses de salaires de 16% et qui limite en même temps le «sacrifice» des cadres à un petit 1% de leur traitement.


On voit bien, avec l’exemple de la Zeba, à quoi mènent les privatisations d’entreprises publiques :



  • Baisse des salaires.

  • Dumping salarial à l’embauche.

  • Dégradadation de l’ambiance de travail avec une hiérarchie de plus en plus pesante.

  • Démotivation du personnel qui ne se sent plus respecté.

La grève de la Zeba revêt une grande importance, non seulement à Bâle, mais dans tout le pays. Elle donne un signal que les salarié-e-s sont prêts à lutter pour défendre leurs conditions de vie et ne se soumettent pas à des rapports sociaux qui donnent partout la priorité absolue au capital au détriment du travail.


Nous condamnons avec la plus grande énergie l’intervention policière contre les grévistes. Sous prétexte d’assurer la «liberté du travail», cette intervention visait évidemment à démoraliser les grévistes et à briser la grève !


On voit bien aussi ce que signifie plus de marché et plus de privatisations. Cela signifie plus d’Etat, mais plus d’Etat dans sa fonction répressive, au service de l’ordre social actuel et de la minorité qui vit du profit et non du travail.


(Je sais que beaucoup de policiers n’étaient pas d’accord d’être utilisés contre les grévistes et qu’ils ont dû obéir aux ordres venus d’en haut.)
Quand à nous, nous voulons plus d’Etat mais dans un tout autre sens, un Etat qui assume son rôle de producteurs de services publics essentiels pour la population dans la santé, l’éducation, les transports, le social. Un Etat qui garantisse des conditions de travail correctes et décentes pour les salariés. Nous ne voulons pas d’un Etat qui soustrait à ses responsabilités et qui invoque les forces du marché pour imposer des salaires de misère aux travailleurs/euses.

C’est dans ce sens que nous soutenons l’initiative pour la réétatiser la Zeba afin de lui donner un futur et des perspectives.

Le gouvernement bâlois, en tant qu’actionnaire principal de l’entreprise, doit maintenant tenir les engagements qu’il a pris au moment de la privatisation, à savoir:


  • Garantir les acquis sociaux et les salaires du personnel.

  • Augmenter les salaires des nouveaux engagés, qui sont indécents!

  • Mettre les moyens à disposition pour que cette entreprise soit viable!

Nous savons qu’une grève reconductible est difficile et comporte des sacrifices. Nous vous disons: tenez bon jusqu’à ce qu’une solution acceptable pour vous soit atteinte!

C’est dans ce sens que notre syndicat vous apporte son plein soutien dans votre lutte.