Une esquisse de la inquième Internationale


Sommet de la Commission européenne …very Nice ?



Prochain grand rendez-vous au calendrier anti-mondialisation néolibérale, les mobilisations du 6 au 8 décembre prochain à Nice risquent bien de faire beaucoup de bruit. Au moins 50 000 personnes, venues de toute l’Europe, sont attendues pour manifester contre le sommet de l’Union européenne qui se tiendra dans la ville de bord de mer.


Pour les mouvements sociaux, il s’agit avant tout de dénoncer le rôle moteur de l’Union dans le processus de mondialisation libérale et plus particulièrement celui de la Commission européenne, acquise depuis longtemps aux thèses ultralibérales, qui poursuit systématiquement son offensive contre les services publics, pour les privatisations, et, au niveau international – à l’OMC en particulier – pour la libéralisation à outrance du commerce des biens et des services. Détenant déjà le monopole des propositions d’actes législatifs communautaires, la Commission risque de voir ses prérogatives s’étendre grâce à une “ réforme ” institutionnelle décidée à Nice.


Objet de toutes les colères, la Charte européenne des droits fondamentaux, dont le statut définitif sera défini à Nice, ne manquera pas d’occuper une place centrale dans les mobilisations. Non seulement la Charte ne consacre pas les droits sociaux les plus élémentaires (droit au travail, à un revenu minimum, à une rémunération équitable, au logement, etc.), mais elle constitue un véritable instrument de régression sociale qui donne à l’Union les moyens de confisquer les droits aux prestation (chômage et revenu minimum) et à terme d’anéantir les systèmes de protection sociale.


Au programme des activités niçoises : grande manifestation le 6, occupation pacifique de la ville, blocage de la Conférence, actions directes non-violentes, ainsi que la tenue d’un contre-sommet des mouvements sociaux.


(jdd)






En mouvement



Une «esquisse de Cinquième Internationale»…


Nous reprenons ici quelques extraits édifiants tirés du Mensuel de l’actualité économique et sociale, organe de l’Union des industries métallurgiques et minières françaises, principale composante du Medef (organisation faîtière du patronat français), sur les mobilisations en cours contre le Sommet de Nice.


«…La situation est apparemment plus calme qu’au printemps, les conflits les plus médiatiques ayant cessé. Il n’empêche que le climat s’alourdit. Les tensions sont latentes aussi bien dans le secteur marchand que dans le secteur public. Dans le même temps, le clivage s’est accentué entre les cinq organisations syndicales à l’occasion des négociations sur l’assurance chômage. Ces confédérations représentatives sont au surplus vivement critiquées, voire combattues par la myriade d’organisations (syndicats et associations) constituant le «pôle radical».


Le mouvement protestataire contre la mondialisation mobilise précisément cette mouvance. Le militantisme trouve, semble t-il, dans ce domaine, un écho grandissant et suscite, en dehors du monde de l’entreprise, des formes d’actions radicalement nouvelles mais qui auront fatalement, à terme, des retombées sur les entreprises. (…) Comme nous le disions, au lendemain des deux congrès de la CGT et de la CFDT, en février 99, (…) l’échiquier syndical a d’avantage de chance de rester éparpillé que de se «recomposer» (…)


Dans l’immédiat, des alliances d’un autre type se nouent pour former un front anticapitaliste visant à lutter contre la mondialisation. Nous avons déjà évoqué ce mouvement à l’occasion des manifestations de Seattle contre l’OMC à la fin de l’année dernière. On a retrouvé à Millau, le 30 juin dernier, ces forces qui entendent s’opposer à la «dictature des marchés».


Il ne faudrait surtout pas réduire ces «nouveaux mouvements sociaux», parfois hauts en couleurs, autour d’un personnage pittoresque à une manifestation folklorique. Il s’agit d’une tendance de fond qui s’affirme, s’organise et surtout s’internationalise. Le plus frappant est l’élargissement de l’éventail composant cette vague antimondialiste. Côté français, on y trouve les trois syndicats opposants à l’accord du 14 juin, le groupe des Dix-Solidaires (nouvelle appellation) qui regroupe les syndicats SUD, les trois associations de chômeurs citées plus haut, ATTAC, les associations de «Sans» (DAL, Sans-logis, etc…).


Les partis politiques n’étaient pas non plus en reste: PC, verts, sans oublier la LCR, LO… La confédération des syndicats libres (CISL: 125 millions d’adhérents) «s’interroge»: elle estime de sa vocation de contribuer à élargir une «nouvelle gouvernance de l’économie mondiale qui soit effectivement au service du développement humain pour tous et pour toutes».


On insistera sur la nature radicalement nouvelle de cette mouvance, tant par ses mobiles que ses méthodes: l’action directe (avec opérations «coup de poing»), l’utilisation des médias fort complaisants à leurs thèses pour émouvoir l’opinion publique de façon sympathique, l’exploitation d’Internet qui est un formidable vecteur de propagation de ses thèses et un puissant fédérateur. L’habileté des leaders est également à souligner, notamment leur volonté de donner à ce type de manifestations, le caractère d’une fête joyeuse, bannissant les violences mais rassemblant force intellectuels avec le soutien plus ou moins explicite de dignitaires religieux pour équilibrer l’aspect doctrinal et l’aspect «ludique» qui attire les jeunes.


Bref, ces organisateurs bien décidés à réitérer ce nouveau genre de «grand-messe», à l’occasion des réunions du FMI ou de l’OMC, doivent être pris au sérieux. Il s’agit ni plus ni moins d’une esquisse de «Cinquième Internationale». Ce mouvement se déroule en dehors des entreprises, mais celles-ci en subiront forcément, à terme, des retombées, et elles ne semblent guère préparées à faire face».