Marche Mondiale: des millier de femmes à Vigo

Une délégation suisse composée de douze femmes de Genève, Neuchâtel, Berne, Jura et Aarau, a participé à la mobilisation européenne de la Marche Mondiale des Femmes des 22 et 23 mai 2004 à Vigo, en Galice. Premier événement d’une longue série qui suivra en 2005. Cette rencontre a été un succès encourageant et motivant pour toutes les femmes.

De nombreux débats et des stands traitant de sujets touchant particulièrement les femmes ont été organisés par la coordination galicienne. Le dernier jour, la manifestation dominicale a réuni trente mille féministes venues pour exprimer leur détermination à lutter contre la pauvreté et les violences faites aux femmes.

Ce grand rassemblement féministe a débuté par une réunion de la coordination européenne qui prépare les actions de la mobilisation de 2005. Des sujets graves et dramatiques nous ont bouleversées, mais nous ont aussi donné la force de faire la fête. Il en faut en effet du courage et de la joie pour continuer à lutter.

De 2000 à 2004: mobilisations continues

Vigo s’inscrit dans un processus continu de mobilisations depuis l’an 2000. Cette ville de Galice a accueilli la première des mobilisations qui vont se poursuivre jusqu’au lancement de la Charte mondiale des femmes pour l’humanité en 2005.

Nous marchions pour lutter contre la pauvreté. Les femmes représentent en effet 70% des plus pauvres. Nous avons aussi marché contre les violences et particulièrement contre les violences domestiques que subissent, chaque jour, des millions de femmes dans le monde entier.

A Vigo même, le désastre écologique sans précédent constitué par la catastrophe du pétrolier Prestige, qui transportait dans ses cuves 77000 tonnes de fuel lourd, a affecté des centaines de femmes galiciennes qui se sont retrouvées au chômage du jour au lendemain. Le gouvernement Aznar a négocié avec la compagnie propriétaire du cargo le versement d’une somme dérisoire à une partie des travailleuses et des travailleurs vivant de la pêche pour tenter d’étouffer à la racine la colère et la rébellion qui augmentaient dans la population…

La mobilisation européenne Vigo-2004 a permis d’approfondir les alternatives de la Marche mondiale des femmes en matière de développement durable.

Entre théorie et pratique

Durant la journée de samedi, des forums ont débattu de l’écologie et des alternatives féministes, des femmes et de la constitution européenne, des spiritualités et du féminisme: des stratégies de résistance. Parallèlement, à ces débats, s’est tenu la Feria des Femmes où, à travers de nombreux stands, films, débats, expos-photos, informations, ont été abordés les thèmes suivants:

• Violences domestiques: film parlant des travailleuses des maquiladoras disparues à la frontière entre le Mexique et les USA, et retrouvées assassinées et mutilées. Longue liste avec le nom des femmes assassinées en Espagne l’an passé dans le cadre de la violence domestique.
• Pauvreté: témoignages de cinq femmes vivant la pauvreté, une sans domicile fixe suite à un divorce, une veuve avec deux enfants travaillant comme domestique, une gitane, une handicapée et une mère élevant seule ses enfants.
• Droits et libertés sexuelles: exposition photos sur le corps ainsi que des affiches revendiquant le mariage pour les lesbiennes. Présentation de livres sur ces sujets.
• Ecologie: exposition sur les aliments génétiquement modifiés et leurs conséquences sur la santé et l’environnement. Un atelier pratique de préparation d’un produit écologique de nettoyage. Très facile à réaliser chez soi.
• Immigration: exposition photos expliquant les raisons et les conséquences de l’exode de nombreuses femmes obligées de partir de leurs pays pour survivre. Stands de nourriture du monde entier sur fond de musique multiculturelle. Espace de récits et de contes engagés pour enfants.
• Militarisation: vision d’un film parlant des commandantes du Chiappas et de leur réalité. Espace de débat sur les conséquences de la guerre sur les femmes.
• Education: exposition photos de femmes célèbres à travers les âges. Exemples de matériel pédagogique féministe.
• Santé, droits reproductifs et avortement: un panneau explicatif revendiquait le droit à la contraception et à l’avortement, et décrivait notamment, lors de grossesses non désirées, les dangers d’un avortement clandestin dans les pays où l’IVG est réprimé.

La manifestation du dimanche, haute en couleurs, s’est déroulée dans une ambiance caractérisée par la bonne humeur et la combativité. Les femmes ont scandé tour à tour des slogans portant principalement sur le statut social des femmes, l’église catholique, et les violences domestiques, tels que: «Brûler la conférence épiscopale, machiste et patriarcale», «Nous sommes belles, nous sommes futées, nous sommes toutes des féministes», «Juges et politiciens sont aussi coupables».

Lors des interventions, en fin de manifestation, nous avons vécu des moments d’intense émotion, particulièrement lorsque Lupe Ces, coordinatrice galicienne, a rendu un hommage en nommant par son prénom la dernière femme victime de la violence domestique en Galicie, assassinée par son compagnon.

Vers un autre monde…

Les débats et la manifestation ont été un encouragement pour préparer les luttes ainsi que les mobilisations européennes et planétaires de 2005. Nous avons trouvé à Vigo l’énergie nécessaire pour continuer cette longue lutte contre le patriarcat et le néolibéralisme. Nous voulons un monde où chacune et chacun trouve sa place, quelle que soit son orientation sexuelle, son âge, son origine et sa couleur.

Maria CASARES
Marche Mondiale des Femmes