Les libéraux présentent la facture de leur initiative anti-impôts

Les libéraux présentent la facture de leur initiative anti-impôts

Le Code pénal définit l’escroquerie comme l’acte de «celui qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura astucieusement induit en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais […] et aura de la sorte déterminé la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts…» Définition faisant penser aux arguments des libéraux en faveur de leur initiative anti-impôts, que nous avons combattue en 1999, et dont on voit aujourd’hui les effets se déployer pleinement.

A l’époque, les libéraux affirmaient, dans la brochure destinée aux électeurs-trices, que leur initiative (IN 111) était «un instrument d’élargissement de l’assise fiscale, en retenant des “gros” contribuables et en en invitant des nouveaux à s’installer dans le canton.» Et encore, disaient-ils: «Il ne s’agit pas de faire baisser durablement les recettes fiscales, mais bien plutôt, à travers la relance, de les augmenter.» Enfin, ils affirmaient avec aplomb que «ce sont les moyens de l’Etat qu’il s’agit de préserver, pour que celui-ci puisse garantir les prestations sociales et les engagements du canton.»

Un milliard pour les riches

Aujourd’hui, ni la garantie des prestations sociales, ni celle des engagements du Canton ne sont au rendez-vous, au contraire. Les 400 millions par an de cadeaux fiscaux – l’ordre de grandeur du déficit du projet de budget 2004 – sont passés dans les poches des plus riches.

Les prétendus effets de relance économique n’étaient que mensonges: sitôt introduite cette baisse, la croissance économique s’est ralentie puis on a vu la récession l’an passé. Les baisses de fiscalité directe profitent, on le sait, surtout aux hauts revenus qui épargnent davantage et spéculent en bourse: cela ne stimule en rien la consommation. Mais d’un autre côté, comme nous l’annoncions à l’époque: «…près de 100 000 ménages disposant des revenus les plus bas» n’ont pas vu leur impôts diminuer ou alors de montants insignifiants. «Alors que le coût des coupes sociales […] se chiffreront par centaines de francs.» L’initiative du patronat et des libéraux genevois, soutenue par les radicaux et le PDC, visait disions nous encore «à relancer la dynamique des déficits pour exiger une réduction importante des prestations à la population.» C’est ce qui se passe aujourd’hui, c’est aux usagers de la fonction publique et aux salarié-e-s de celle-ci que la droite présente sa facture.

Ceci après avoir encore accru le déficit par une série de baisses fiscales supplémentaires ces dernières années: introduction de l’imposition du taux fixe pour les personnes morales, suppression du droit des pauvres, suppression d’émoluments en matière immobilière… avec aussi le récent sabrage de l’impôt sur les successions. Sans parler des cadeaux fiscaux aux multinationales venant à Genève, ainsi qu’aux multimillionnaires par de scandaleux forfaits fiscaux.

Et ce n’est tout, les projets de baisses d’impôts diverses, au bénéfices des nantis, présentés par les partis de droite, qui sont encore dans le «pipe-line» législatif se montent à environ 400 millions par an. Au total, on est près du milliard par an de cadeaux aux riches effectués ou projetés par la droite genevoise!

Les responsables de la dette

C’est aussi cette majorité de droite qui est responsable de la dette de 11 milliards. Dans les années 1980, elle a multiplié les investissements inconsidérés au le plus grand profit de ses copains dans la construction. Dans les années 1990, elle a réalisé des déficits cumulés d’environ 3 milliards en déstructurant l’administration fiscale, dirigée par le libéral Vodoz. Enfin, elle a conduit la Banque cantonale au bord de la faillite par des prêts spéculatifs aux petits copains, obligeant les collectivités publiques à intervenir pour plus de 2,5 milliards. Et maintenant, elle veut faire payer la facture à la majorité de la population et aux salarié-e-s du public, alors qu’elle a combattu avec acharnement – et de gros moyens – la concrétisation de notre initiative fiscale visant à faire rembourser la dette par les hauts revenus et les gros bénéfices (IN 113) pourtant acceptée par les électeurs-trices,en juin 2002!

Dans leur «accord» solennel concernant le budget, conclu ce 4 mai et annoncé tambour battant par les libéraux, les radicaux et le PDC genevois, ces partis s’engagent à un tour de vis supplémentaire de 150 -160 millions dans l’austérité, par rapport au projet de budget déjà raboté par le gouvernement où ces partis sont déjà majoritaires. Au menu, 50 à 70 millions de rabotés sur les postes de travail, 70 millions de pris sur les dépenses générales et 20 millions de subventions en moins. Le financement de tous les établissements publics: transports en commun (TPG), hôpital (HUG), Université (UniGE)… sont dans le collimateur!

Dans leur accord, ils annnoncent en outre un durcissement du «plan financier quadriennal» du Conseil d’Etat, en exigeant un déficit-zéro pour 2006, deux ans plus tôt que ne le prévoit le gouvernement cantonal, avec aussi la «mise en œuvre intégrale» en 2007 du projet de New Public Management néolibéral GE-Pilote, ainsi que d’autres mesures du même acabit: frein aux dépenses, étude de nouvelles coupes dans les subventions, démantèlement des retraites anticipées (PLEND)…

Propositions ADG

Parlant des organisations du personnel de la fonction publique, le libéral Mark Muller, connu pour son combat anti-locataires, a affirmé dans la conférence de presse de l’Entente bourgeoise présentant cette déclaration de guerre – venant en sus de leur projet de supprimer le statut du personnel du secteur publique – que: «Le Cartel n’est pas un interlocuteur crédible…» Quel mépris! 10 000 manifestant-e-s dans la rue à l’appel du Cartel, des milliers de grévistes dans tous les secteurs de l’Etat et du secteur subventionné… un large soutien de la population… Qui sont les plus «crédibles» les pompiers-pyromanes néolibéraux ou les défenseurs du secteur public?

Quant à nos député-e-s de l’Alliance de Gauche au Grand Conseil, ils ont déposé – en mars – un texte (R 481), qui propose de:

  • geler l’ensemble des projets de lois, résolutions et motions qui conduiraient à diminuer de quelque manière que ce soit les recettes du canton durant une période de 3 ans…
  • d’adopter en urgence une loi qui imposerait aux auteurs de projets de diminutions d’impôts ou de taxes d’indiquer sur quels postes du budget ils entendent compenser la baisse de recettes, afin de permettre à la population de se prononcer de manière véritablement démocratique sur les conséquences de tels projets;
  • d’introduire un impôt supplémentaire sur les grandes fortunes et les gros bénéfices, limité dans le temps, jusqu’au rétablissement de l’équilibre du compte de fonctionnement avant investissements.

Pierre VANEK