Vers un référendum indispensable contre la spéculation électrique

Loi sur le marché de l’électricité (LME)


Vers un référendum indispensable contre la spéculation électrique


«La libéralisation de l’électricité servira de test pour savoir si notre pays est capable de suivre le rythme des transformations structurelles en cours en Europe et dans le monde…»
C’est en ces termes que le président de la commission ad hoc du Vorort patronal s’exprimait en 1999, réclamant une LME qui se «limite au strict nécessaire», «évite toute distorsion de la concurrence» et «laisse la plus large place à l’autorégulation».(1)


Deux ans plus tard, les Chambres, aux ordres, ont fait le boulot ! Le secrétaire général du PSS a beau vanter le travail de son groupe parlementaire qui aurait «frayé la voie à quelques principes écologiques importants»,(2) décrivant ainsi les miettes soi-disant obtenues au finish pour la rénovation des barrages, la loi répond bien à la commande patronale. Elle «dérégule», plus vite que ne le prévoient le projet initial et la directive de l’UE, elle ouvre la voie au règne sans partage du profit des actionnaires sur la production et la distribution d’un bien de première nécessité, à l’impact écologique indiscutable.


Le minimum, avoir en main publique le réseau de distribution national haute tension, n’est pas atteint et ce sont des requins, comme David de Pury et consorts, qui ont fondé une société à cette fin la Schweizer Stromnetz AG, qui risquent de rafler celui-ci et de voir garantir leurs profits à vie, grâce à la LME.


Rappelons – au chapitre de l’autorégulation – que c’est ce même de Pury, qui critiquait dans son Livre blanc néolibéral le caractère «timoré» des premiers balbutiements suisses en matière de déréglementation électrique, incarnés par le Rapport Catin en 1995(3). Il déplorait alors que celui-ci ne se prononce «que pour des mesures extrêmement circonspectes quant à l’ouverture et à la privatisation du secteur électrique» et protestait quant à l’atteinte à la liberté constituée par l’idée de mesures pour l’utilisation rationnelle de l’énergie. Il a toutes les raisons d’être satisfait du chemin fait, politiquement d’abord, avant de toucher en espèces les dividendes de son effort.


S’il fallait encore convaincre du caractère antisocial, antiécologique et finalement antidémocratique de la LME le Conseil fédéral, prend la peine dans son message d’écrire que: «Seule une liberté d’action suffisante des entreprises peut permettre aux fournisseurs d’électricité d’adopter un comportement axé sur la compétitivité. Il conviendrait donc de renoncer volontairement à toute pression politique superflue sur les décisions qu’ils prennent. La privatisation des entreprises publiques pourrait constituer une stratégie utile.»


Tous ceux qui pensent que les axes sociaux et écologiques doivent primer sur la «compétitivité» marchande, que le contrôle politique démocratique d’un secteur public électrique est important, doivent combattre la LME. Même Christiane Brunner s’en rend compte. Questionnée dans Le Temps (5) «Arriverez-vous à faire comprendre qu’un référendum contre la loi sur le marché de l’électricité n’est pas une priorité du PS?» Ne répond-elle pas en soupirant: «J’essayerai, mais je sais que cela va poser un problème…» !(4)


Des problèmes, elle n’est pas seule à en avoir, les référendaires potentiels qui se sont réunis à Lausanne le 19 décembre et qui se revoient le 4 janvier en auront aussi. Les intérêts matériels en face sont énormes, les moyens pour «vendre» cette loi le seront aussi. Mais il y a des facteurs positifs: la réaction syndicale dans la branche (FTMH et SSP) contre la loi, l’opposition d’antinucléaires comme ContrAtom qui critiquaient eux aussi – en 1995 déjà – le Rapport Catin, ainsi que l’engagement du côté suisse allemand de secteurs significatifs, comme par exemple des militants du Comité de gauche qui a obtenu en juin – à la surprise générale – le refus en votation populaire de la privatisation des EWZ, la régie électrique municipale zurichoise. Enfin, l’actualité aux USA, nous sert sur un plateau le désastre de la dérégulation-pilote de l’électricité en Californie (v. art. p. 13 à 15 ) qui sera un outil de propagande anti-libérale de premier ordre…



  • 1 G. E. Grisard cité par la SDES sur www.sdes.wf-online.ch
  • 2 R. Gamma in Service de presse du PSS du 20.12.00
  • 3 V. solidaritéS-INFOS N° 56 du 30.4.96
  • 4 Message du CF concernant la LME du 7.6.99 (p. 6650)
  • 5 Le Temps du 13.12