Polarisation électorale: un élu de solidarités à Berne

Polarisation électorale: un élu de solidarités à Berne

Arithmétiquement, les résultats genevois accusent une très légère progression de la droite (+1%), au détriment de la gauche (-1%). A droite, l’UDC fait un bond en avant (+10,9%), presque entièrement au détriment du reste des partis bourgeois (-9,7%). A gauche, le PS (+4,8 points) et les Verts (+3,0 points) font de très bonnes performances, aux dépens du PdT (-6,0%) et de solidaritéS-Indépendants (-2,6%, recul que l’on peut attribuer au retrait du groupe des Indépendants).


Politiquement, ces résultats auront des conséquences importantes. A droite, ils annoncent le durcissement de l’offensive anti-sociale et xénophobe, sous la houlette des secteurs les plus réactionnaires, avec un Parti libéral qui résiste bien, mais se voit fragilisé par la perte de son groupe parlementaire à Berne, et des Radicaux à la dérive. A gauche, la tentation de mettre de l’eau dans notre vin pour flirter avec la ligne consensuelle du PS et des Verts serait en revanche suicidaire. Ceci n’empêche pas, bien sûr, de favoriser l’action commune sur des objectifs concrets, pour s’opposer aux politiques néolibérales.


Ceci dit, l’ADG ne peut mettre la tête dans le sable: un débat de fonds est nécessaire pour relancer un projet politique fédérateur, sur le plan électoral du moins, qui s’oppose frontalement au néolibéralisme et à ses variantes blairistes, mais se montre aussi capable de mobiliser largement.

L’Alliance de Gauche fragilisée

L’Alliance de gauche présentait deux listes sous-apparentées. En effet, depuis 4 ans et demie, le Parti du Travail a choisi de faire cavalier seul, sauf au Grand Conseil, ce qui a sans doute contribué à affaiblir la crédibilité d’ensemble de l’ADG. Il n’avait cependant pas de raison de changer de formule cette fois-ci, pour une élection qui prévoit explicitement la possibilité d’un sous-apparentement entre les «ailes» d’un même front électoral, ici l’ADG. Nous avions nous-même choisi cette option, en 1995…


De leur côté, les Indépendants – qui ont un statut de groupe, tout comme solidaritéS ou le PdT, au sein de l’ADG – ont toujours défendu le principe de listes uniques, point de vue que nous avons aussi soutenus sans discontinuer, en ville de Genève comme au Grand Conseil. Cette fois-ci, face à la décision du PdT de partir seul, les Indépendants ont renoncé à présenter une liste propre, dans le cadre du sous-apparentement ADG, ce qui a sans doute pesé sur les résulats, d’autant qu’ils n’ont donné aucune consigne de vote en faveur des listes ADG, menant exclusivement campagne, de façon surprenante, pour l’élection de Christianne Brunner au Conseil des Etats.

Une opportunité nationale

Deux éléments supplémentaires – non réductibles aux désaccords tactiques au sein de l’AdG – ont pesé sur ses résultats globaux. D’abord, l’effondrement sans précédent du Parti du Travail (de 8,4% à 2,7%), qu’annonçait déjà en pointillés ses résultats en Ville de Genève ce printemps, mais qui se confirme aussi, de façon moins spectaculaire, dans d’autre régions de Suisse Romande. Ensuite, l’augmentation important de la participation (+13%), qui a accentué la bi-polarisation nationale UDC / PS-Verts, en poussant au «vote utile», pénalisant ainsi les forces qui ne disposaient pas d’un groupe parlementaires aux Chambres fédérales.


Dans une telle situation, l’élection de Pierre Vanek au Parlement et les bons résultats de nos nos camarades vaudois nous encouragent à poursuivre la construction d’une Alliance Socialiste nationale ouverte, avec solidaritéS-Neuchâtel et SoAL-Solidarität (Bâle et Berne). En même temps, nous devons nous donner les moyens de poursuivre la lutte et de débattre politiquement avec les autres signataires de l’appel «A Gauche toute!», à Zurich, en Argovie et à Schaffhouse, de même qu’avec l’Alternative Socialiste Verte de Zoug et la gauche des Verts en Suisse Alémanique, qui ont remporté un large succès.

Résultats de solidaritéS

SolidaritéS a obtenu des résultats globalement satisfaisants: 4456 bulletins (5,4%). En 1995, nous avions recueilli 2225 bulletins (3,8%), contre 4916 (8,0%) en 1999, mais avec l’appui des Indépendants. Nous avons donc indiscutablement réussi à mobiliser les secteurs qui nous soutiennent généralement, grâce à une campagne très active. Il semble aussi curieusement, que le retrait des Indépendants, ainsi que leur appel exclusif à soutenir Christiane Brunner, nous aient beaucoup moins pénalisés que le PdT.


Notons encore que notre score dépasse la moyenne cantonale à Carouge (7,5%), en Ville de Genève (7,2%, avec des pointes entre 10 et 12% à Cluse-Roseraie, Cropettes-Vidollet, Mail-Jonction, Pâquis ou St-Gervais) et à Vernier (5,7%). En revanche, nous faisons sensiblement moins bien dans une série de grandes communes comme Lancy (5,0%), Onex (4,8%), Versoix (3,0%) ou Meyrin (2,9%). Il faudra y réfléchir pour l’avenir.


Jean BATOU