Parc automobile contre parc naturel

Parc automobile contre parc naturel

La population de la ville de Neuchâtel va-elle, le 14 septembre prochain, refuser de troquer un parc automobile contre un parc naturel sur les rives de son lac? C’est du moins la question que lui pose par référendum les partis de droite, prétextant le coût inacceptable du projet.


No comment!

Il n’est certainement jamais un mal de demander l’avis du peuple. Faut-il encore lui poser une question censée. En l’occurrence, on ressent comme une impression d’agitation et d’effets de manche pré-électoraux (une année) qui entraînent perte de temps et d’argent. Pour des partis qui ne cessent de dénoncer l’augmentation des budgets des collectivités publiques, on pourrait espérer plus cohérent. L’ambiance de la campagne référendaire est triste, le résultat des urnes ne devrait surprendre personne.


Cette affaire me rappelle les termes d’un rapport récent du Conseil de l’Europe1, lequel recommande expressément aux politiciens de chercher, dans les procédures budgétaires, à «dissuader des baisses de taxe, des augmentations de dépenses de transferts, des recrutements ou des projets d’investissements justifiés essentiellement pas l’approche d’échéances électorales2» et à «empêcher le report inconsidéré de charges vers le futur».


A bon entendeur!

(de)

  1. Procédures et gestion budgétaires au niveau des collectivités locales, Rapport du CDLR, du 28 mai 2000, Ed. du Conseil de l’Europe, p. 9.
  2. Souligné par l’auteur.


La question du réaménagement des rives de Neuchâtel se pose, alors qu’Expo.02 ferme ses portes. Le Conseil communal (exécutif) présente un projet qu’il soumet à une large consultation. L’ensemble est devisé à fr. 7,7 mio. Le point fort consiste à supprimer un parc de stationnement gratuit de 530 places et transformer l’espace conquis en un parc herborisé, avec plage, places de jeux et scène couverte (cadeau d’Expo). Généralement salué par la gauche et une majorité d’associations locales, l’idée fait bondir la droite, parti radical et TCS en tête. A force de pression, l’exécutif plie. Le projet final prévoit un parking de 360 places, ramenées à 100 dès l’extension d’un parking souterrain à proximité, mais au plus tard en 2008. Au passage, la scène couverte disparaît. Les partis de droite insatisfaits prétextent aussi le coût du projet et lancent un référendum.

Un coin vert en ville

L’avènement de l’exposition nationale a rendu leur beauté au site des Jeunes-Rives et donné l’occasion de revoir un concept urbanistique qui datait de 1975. En termes aussi bien sociaux, qu’environnementaux et économiques, le réaménagement proposé améliore sensiblement l’utilité de l’espace au profit des habitants et constitue une base modulable au gré des besoins et des souhaits futurs. Il est important pour la population d’une ville de sauvegarder quelques endroits où elle peut se détendre et se rencontrer. Certains parcs sont mondialement connus pour leur convivialité.

Les voitures et l’économie


Le trafic individuel motorisé ne saurait plus aujourd’hui être défendu sérieusement. La nécessité de maîtriser les dangers et l’augmentation des coûts liés à la pollution par la voiture (au niveau du bruit, de l’air et de la surface sacrifiée) est une évidence. L’accès aux centres des villes doit être assuré par un réseau performant de transports publics. Et la santé économique des petits commerçants ne peut pas dépendre de quelques centaines de places de parc (qui en l’occurrence servaient surtout les pendulaires).

Cher ou pas cher?

Le coût du projet est également critiqué. S’il est certain qu’il a un prix, il est tout aussi certain que le référendum a retardé les travaux d’une année et plus. Notons que le crédit finalement adopté de 7,5 mio compte une participation financière d’Expo.02 (1,9 mio) et bénéficie d’une coordination entre le démontage des installations de l’exposition et le réaménagement du terrain.


A titre de comparaison, la ville de Neuchâtel dépense 15,3 mio de francs chaque année à la rubrique des coûts externes liés au trafic routier (uniquement nuisances sonores, accidents, atteintes aux bâtiments et rupture de l’espace public – sans compter les atteintes à la santé et à l’environnement).


Si l’on considère enfin que la seule variante du projet est de revenir à la situation antérieure, la réponse à la question s’impose d’elle-même. SolidaritéS a soutenu ce projet de réaménagement des Jeunes-Rives au parlement et appelle aujourd’hui la population à voter oui le 14 septembre 2003.


Dorothée ECKLIN