Pavatex, une grève terminée trop tôt?

Le 20 octobre dernier, le conseil d’administration de la société Pavatex SA a décidé d’entamer une procédure de consultation pour la fermeture de son site de production de Fribourg. Pavatex SA est considérée comme un leader dans son domaine, celui de la production et la commercialisation de systèmes d’isolation en fibre de bois.

La société comprend également deux autres sites de production, l’un en France et l’autre dans le canton de Zoug. En 2013, son chiffre d’affaire s’élevait à quelques 100 millions de francs, et les projections pour 2014 promettent d’atteindre les mêmes sommets. Le franc fort, la hausse des coûts de production et la situation difficile sur les marchés sont avancés pour justifier la décision de fermeture du site de Fribourg. Ainsi, 45 postes seraient voués à la disparition d’ici fin décembre.

Durant toute cette première phase de consultation, la direction a refusé de considérer les syndicats comme interlocuteurs et n’a voulu entrer en discussion qu’avec les re­pré­sen­tant·e·s du personnel. Une représentation du personnel dont la légitimité est contestée, notamment en raison de sa proximité avec la direction, mais aussi suite à des pressions qui auraient été exercées sur les re­pré­sen­tant·e·s, dont deux ont démissionnés récemment.

 

 

Des « mesures d’ac­com­pagne­ment » seulement

 

Close le 11 novembre, la procédure de consultation ne donnera lieu à aucun plan social. Des «mesures d’accompagnement» individualisées sont promises par la direction. Des promesses floues et qui n’ont pas su convaincre les travailleurs et travailleuses concernés. Appuyés par le syndicat Unia, ils et elles ont entamé une grève l’après-midi du 11 novembre, avec comme revendication la reconnaissance du syndicat Unia comme interlocuteur.

Voilà qui n’a pas plu aux dirigeants de la société, dénonçant une «prise en otage» de la part des syndicats et répétant ad nauseam avoir respecté le cadre légal suisse. Sur ce dernier point, ils ont malheureusement raison, puisqu’il n’existe aucune obligation légale de mettre sur pied un plan social lorsqu’une entreprise qui compte moins de 250 salarié·e·s licencie collectivement des travailleurs et des travailleuses.

Après deux jours et demi de grève et de blocage des stocks, l’Etat a été appelé à l’aide pour tenter une médiation entre les parties. Elle débutera le jeudi 13 novembre au soir pour aboutir le vendredi matin sur un accord qui comprend l’interruption de la lutte des sa­larié·e·s. Des négociations débuteront donc dès le lundi 17 novembre entre la direction du groupe et le syndicat Unia accompagné d’une délégation de sa­larié·e·s de l’entreprise. En outre, la présence d’un représentant du DEE (Département de l’économie et de l’emploi) a été requise par les parties.

Le but est aujourd’hui de mettre sur pied un plan social digne de ce nom. Une question se pose alors quant à la pertinence de la stratégie syndicale. En effet, interrompre les mesures de lutte sans aucune concession de la part des patrons (si ce n’est la reconnaissance du syndicat, ce qui, de prime abord, n’apporte rien de concret aux salarié·e·s) semble un peu court. D’autant plus qu’en face, les intentions sont claires. Persuadés d’en avoir déjà fait bien assez, la direction n’a pas l’intention de céder aux « preneurs d’otages ». Espérons que, le cas échéant, la relance du mouvement et la remobilisation des travailleurs et travailleuses de Pavatex pourront recréer un rapport de forces plus positif. 

 

Eric Peter