Allemagne

Allemagne : La grève suspendue des conducteurs de locos

La véritable chasse aux sorcières déclenchée par une partie de la presse allemande aura peut-être mis prématurément fin à la grève lancée par le syndicat des conducteurs de locomotive GDL. Mais ce n’est que partie remise pour les revendications des grévistes : des discussions devraient bientôt s’ouvrir avec la direction de la Deutsche Bahn.

 

 

Claus Weselsky, le président du GDL, aura été un gibier de choix pour la presse de boulevard façon Bild ou Focus. Le premier l’a traité de mégalomane 1 en publiant son numéro de téléphone afin que ses lecteurs puissent le harceler, le second a affiché sur son site la photo de l’entrée de son immeuble à Leipzig. Sans s’en prendre à sa personne, le reste de la presse a massivement pris position contre la grève des conducteurs de locomotive de la Deutsche Bahn.

Pourtant le mouvement a été suivi, suffisamment en tout cas pour bloquer le trafic durant 64 heures dans le trafic voyageurs et 72 heures dans le trafic marchandises. Ce qui en fait le plus grand mouvement social de la Deutsche Bahn depuis sa privatisation, il y a vingt ans.

 

Des revendications légitimes

 

Le GDL ne demandait toutefois pas la lune. Ses revendications, contrairement à ce qu’affirmaient les médias, n’avaient rien d’époustouflant : une augmentation des salaires de 5 %, une réduction du temps de travail de 39 à 37 heures, une limitation des heures supplémentaires à 50 par an, ainsi qu’une réduction de la durée maximale d’un trajet à huit heures.

Seulement voilà : le GDL, syndicat majoritaire dans la catégorie des conducteurs, mais minoritaire au niveau de l’entreprise, avance ces requêtes aussi pour les conducteurs de la manœuvre et les contrôleurs, deux catégories auparavant organisées par le syndicat « traditionnel » EVG, membre de l’organisation faîtière DGB (proche des sociaux-libéraux du SPD). Ce qui en dit long sur la perte de crédibilité de cette organisation syndicale, qui n’a fait qu’accompagner mollement la privatisation de la Deutsche Bahn et ses conséquences. Du coup, plusieurs dirigeants syndicaux du DGB se sont joints à l’hallali contre le GDL. Le SPD, membre de la coalition gouvernementale aussi, évidemment. Même l’un des porte-parole de Die Linke, ancien syndicaliste combatif, a apporté son écot à cette campagne honteuse.

 

« Unité conventionnelle » contre droit de grève

 

L’action du GDL tombait il est vrai on ne peut plus mal pour la bureaucratie syndicale, tout occupée à négocier un projet de loi avec le gouvernement sur la prétendue « Unité conventionnelle » (Tarifeinheit), prévoyant une seule convention par entreprise négociée par un seul syndicat reconnu. Seul ce dernier aurait alors droit de faire grève. Sous prétexte de renforcement de l’unité conventionnelle, c’est en fait une grave remise en cause du droit de grève qui surviendrait, avec en prime la liquidation des petites organisations combatives. Pour l’instant, les délégués du DGB ont refusé ce projet, sans mettre fin toutefois aux discussions préparatoires.  DS